Les
Colonnes Infernales
au début de l’année
1794
Si vous savez peu de
choses sur la Guerre de Vendée voici
un petit aperçu des préliminaires.
Le mois de janvier 1794 est encore un mois où la guillotine ajoute son oeuvre à
celle des fusillades et noyades, mais ici ou là quelques lueurs d'espoir
percent cependant.
Joseph Léopold Sigismond Hugo, le
père de l'écrivain Victor, préside une sous-commission assez humaine pour
épargner la vie de 22 jeunes filles...
La “Vendée militaire” semble morte et pourtant on continue à s'acharner sur
elle.
Le député Fayau
écrivit au conseil du département de Vendée : « Vous
savez comme moi, citoyen, que les brigands appelés de la Vendée, existent
encore, quoique on les aye tués plusieurs fois à la tribune de la Convention.
Ils ont même remporté quelques avantages sur nos troupes près de Dôle, et je
viens d'apprendre qu'ils dirigeaient leurs pas sur votre territoire... Je vous
engage, citoyens administrateurs, à prendre les mesures les plus promptes, et
les plus énergiques, pour que les armées catholiques et royales, dans le cas où
elles rentreraient dans la Vendée, n'y trouvent plus qu'un désert. Aux
grands maux, de grands remèdes. Il faut purger la patrie, point de
commisération, point d'égoïsme.»
Le 23 décembre 1793, la "Virée de Galerne" se termine en
carnage dans les bois et les marais de Savenay sur la rive droite de la Loire.
Turreau, nouveau Général en Chef de
l'Armée de l'Ouest (nommé le 22 novembre, il prend effectivement le
commandement le 26 décembre) arrive le 7 janvier à Nantes après avoir assisté à
la prise de Noirmoutier.
Kléber lui
présente 2 plans de pacification :
- 1ère proposition présentée par
Kléber, le 7 janvier 1794
- 2ème proposition présentée par
Kléber, le 7 janvier 1794
Dans sa 2ème proposition il affirme :
”Il est impossible
d'embrasser avec nos forces la vaste enceinte de ce territoire : il n'en
résulterait qu'une perte de temps considérable et des marches inutiles. Il en
résulterait peut-être encore que l'on forcerait tous les paysans de l'intérieur
qui ne demandent plus que la paix à se réunir en masse et l'on verrait une
nouvelle armée se former dans la Vendée”
La suite lui donnera raison.
L’espoir subsistait-il dans les rangs
dispersés de cette troupe de fantômes vivants ?
Les chefs rescapés tentent de réorganiser un minimum leurs bataillons. La
Rochejaquelein, "Monsieur Henri», combat une petite troupe de
cavaliers bleus ; vers la fin du combat il fait grâce à un bleu qui, à peine
libéré dégaine un pistolet de ses fontes et abat Monsieur Henri. Il meurt sur
le coup, le long d’un chemin, à Nuaillé.
Nous sommes le 15 janvier 1794, les
combats pourraient s’arrêter...
Kleber connaissait bien la situation de la Vendée à cette époque ; il devait cet avantage à la confiance qu'il avait inspirée dans le pays. Ce qu'il craignait, ce qu'il avait annoncé, arriva ; on peut en juger par ce passage du mémoire justificatif de l'adjudant-genéral Hector Legros :
“Turreau, dit Legros, a apporté dans la Vendée le
brandon qui a allumé la seconde guerre vendéenne. A son arrivée dans la Vendée,
tout commençait à jouir d'une paix profonde.
Je partis moi-même de Nantes pour Chollet, vers la fin de novembre 1793, avec quatre ordonnances seulement ; tout était peuplé d'allans et de venans sur ma route. Les chemins de Chollet à Saumur, Clisson, Saint-Florent, Mortagne et Montaigu, étaient également sûrs. L'ordre de marche de douze colonnes, le fer et la flamme à la main, a excité une commotion générale dans toute la Vendée, et forcé à la révolte ceux-mêmes qui n'avaient pris aucune part à la première guerre.”
Le 25 décembre 1793, Turreau demande
une première fois au Comité de Salut Public « s’il approuve le plan
qu’il a conçu de traverser la Vendée sur douze colonnes pour assurer
l’anéantissement total des rebelles. »
Pas
de réponse mais Lazare Carnot le recadre le 13 janvier 1794 et lui
rappelle en bas d’une note
«Hate toi du
moins d’exterminer le dernier des brigands ».
Le 9 janvier 1794, à l'heure même où d'Elbée mourait à Noirmoutier, Charette, poursuivi par le général Dulruy, arrive aux Herbiers, où trois mille hommes l'attendent. Avec ce renfort il marche sur Saint-Fulgcnt. La garnison se retire à Mouchamp, sur le Petit-Lay, où le colonel Joba bivouaquait avec son régiment et deux escadrons de cavalerie. On se battit avec acharnement, et la victoire fut si incertaine que les deux partis se retirèrent avec des pertes égales.
Tous ces mouvements, dont la voix publique grossit l'importance, tous
ces succès que les chefs républicains sont les premiers a constater, rappellent
dans les rangs un grand nombre de volontaires qui, échappés aux massacres du Mans
et de Savenay , n'attendaient dans les landes ou dans les bois que
l'instant favorable pour recommencer la guerre.
La Convention crut que la Vendée renaissait de
ses cendres ; elle s'empressa donc de mettre a exécution le projet
des colonnes infernales que le 21 décembre elle avait décrétées
sous l'inspiration du Comité de Salut Public.
Mais les deux armées républicaines sont
préalablement constituées, et ce, dès le 2
janvier 1794. Le commandement en est confié à Turreau de Garambouville, ancien officier
des troupes royales, ayant caché sa particule et une partie de son nom à la
révolution. Nommé général en chef de l’Armée de l’Ouest, il construit
l’opération et met au point l’organisation des troupes, les itinéraires, les
méthodes à employer...
Le plan prévoit que l’une des armées marchera d’est en ouest, alors que la
seconde viendra face à elle, comme une sorte de mâchoire se refermant sur le
pays, en partant de l’ouest. Chacune de ces armées sera constituée de six
divisions… Ainsi douze colonnes marchant en même temps et dans chaque sens,
devront lorsqu’elles se rencontreront, avoir fait de la Vendée «un désert de
terres brûlées, de chaumières détruites, de châteaux en ruines, de corps
mutilés que survoleront des corbeaux et que dévoreront les loups» indiquera
encore Fayau …
Les colonnes sont regroupées en 6 divisions
:
- la première division est dirigée par
François-Xavier Coudert de Prevignaud ;
il prendra toutes les troupes qui se trouvent auour de Niort. Elle ne sera pas divisée en demi-colonnes, alors que c'était prévu initialement.
Traversant un pays presque exclusivement dévoué à la République, Prévignaud constatera par lui-même qu’il est censé dévaster un secteur où les habitants sont tous patriotes. Il aura donc tout le loisir de constater l'incompétence de Turreau et de ses donneurs d'ordre, qui, évidemment, ne connaissent rien à la géographie politique de la région. Il arrivera à Mazières-en-Gâtine le 22 janvier 1794.
- la deuxième division est dirigée par Grignon ; il réunira les forces d'Àrgenton-le-Peuple et de Bressuire, ses colonnes sont commandées
par lui-même et Lachenay :
La 1ère ira de de Bressuire à Montigny, St-Memain,
le Vieux Pouzauge.
La 2ème ira de Bressuire à Cirière, la Pommeraie, La Flocellière.
- la troisième division est dirigée par Boucret, dont la brigade doit être réunie à
Chollet ; ses colonnes sont commandées par lui-même et Caffin :
La 1ère ira de Chollet à Châtillon, les Epesses.
La 2ème ira de Chollet à Maulevrier, St-Laurent.
- la quatrième division est dirigée par Turreau, commandant la division du Nord, marchera avec le
général en chef, sur la direction de Doué à Chollet: arrivé à Concourson, il
détachera des troupes à droite et à gauche de la route, pour exécuter l’ordre
général.
La 1ère ira de Doué à Cholet par Concourson, les
Cerqueux, St-Hilaire-du-Bois,Vezins
La 2ème ira de Doué à Cholet par Concourson, Le Voide, La Salle-de-Vihiers, Cossé-d'Anjou,
La Tourlandry et Nuaillé
- la cinquième division est dirigée par Cordellier ;
il divisera les troupes qui se trouvent à Brissac, en deux colonnes, et les
fera partir toutes deux à la même heure. Ses colonnes sont commandées par
lui-même et Crouzat
:
La 1ère ira de Brîssac à Thouarcé, Gonnord ,
Chemillé, Le May.
La 2ème ira de
Brissac à Beaulieu, la Jumelière, Nevi, Jallais
- la sixième division est dirigée par Jean-Baptiste Moulin, elle ne comporte
d’abord qu'une colonne forte de 650 hommes qui se réunira aux troupes venant de
St-Florent.
Elle ira de Chalonnes à Saint-Florent puis Ste-Christine.
Il fut enjoint aux généraux de faire chaque jour un compte-rendu détaillé de la marche et des opérations de chaque colonne.
Ci-dessous le parcours des colonnes qui ont ravagé
les Mauges, entre le 20 janvier et le 15 février 1794 ; les
seules vraies routes sont en blanc, le reste des voies consiste souvent en
chemins plus ou moins creux.
Hiver 1794, le contexte
Pour bien apréhender ce conflit il faut prendre en compte la géographie
physique des lieux. Les colonnes ont dû faire face à un réseau routier
quasi-inexistant.
Pour ce qui concerne notre région, les seules routes dignes de ce nom (une
mauvaise départementale actuelle) vont :
- d’Angers à la Roche sur Yon, en passant par Chemillé et Cholet
- de Cholet à Doué par Vezins, Coron, et Vihiers
- de Chemillé à Nantes, par Beaupreau , Gesté et Vallet
Toutes les autres voies ne sont souvent que de mauvais chemins, très creux et
cassants en été, et noyés pendant l’hiver, d’après un usager de l’époque :
« C'est un précipice presque continuel, les
chevaux ne peuvent plus s'en arracher, il ne se passe pour ainsi dire pas de
jour sans qu'on entende parler de quelques voyageurs qui s'y soient embourbés.
»
Et l’hiver 1794
fut très pluvieux ; les chemins sont inondés, les souliers des soldats sont
ruinés en quelques jours, l’approvisionnement est bloqué loin des cantonnements.
En dehors de ces grands axes on est en terra incognita, seuls les
tracés de Cassini donnent la route à suivre mais rien ne dit l’état ni la
largeur de cette route.
Les troupes républicaines sont effrayées à l’idée de quitter la grande route et
ne se risquent que très rarement dans le maquis ; on est bien dans une situation de guerilla où l’ennemi peut surgir de
n’importe où et disparaitre aussi vite. Ceci explique en partie la haine
nourrie envers ces ombres imprenables et l’envie de vengeance envers leur
famille qui conduira aux pires exactions.
Le 22
février 1794, le Général Duquesnoy, écrit à Turreau, depuis St
Fulgent,
« Je te rends compte qu'après avoir donné une escorte à mon ambulance,
partant de Mortagne pour les Herbiers, une voiture
s'est brisée en route. Le commandant de cette ambulance ne m'envoya
aucune ordonnance pour m'en faire part, et l'escorte quitta aussitôt
l'ambulance pour suivre tes deux premières voitures, de sorte que le conducteur, deux charretiers des voitures
embourbées et quelques traînards, tout a été égorgé
et pris par les rassemblements qui s'étaient repliés sur la Gaubretière, la
Verrie, Beaurepai re et Bazoge.
Je te préviens de plus, citoyen général, que le poste que tu as à Mortagne,
si tu ne donnes d'autres ordres, sera égorgé au premier
jour, vu que l'ennemi occupe deux ou trois points qui l'avoisinent.
Le commandant de ce poste m'a même rendu compte que, dans une découverte qu'il
fit faire la veille ou l'avant-veille, il eut quatre
hommes égorgés, dont un officier.
J'attends tes ordres pour renvoyer les voitures d'ambulance, les chemins que je vais parcourir étant impraticables
pour elles »
On voit bien la détresse du général Duquesnoy, devant les attaques
spontanées des Vendéens et l’impossibilité où il est de faire cheminer ses
voitures notamment celles chargées de munitions.
Toute la « promenade » des colonnes se fera dans ces conditions…
Napoléon a affronté la Moscova, Hitler, l’hiver à Stalingrad, et Turreau, le
bourbier Maugeois.
Comme dans
toute guerilla la grande force des Vendéens a été de perturber les communivcations
entre les généraux républicains et leur troupe, pas de vivres, pas de
munitions, pas d’ordres entrainent le désordre et une baisse de moral
irréparables ; une colonne mise en difficulté à Gesté est partie au pas
de course jusqu’aux abords de Nantes.
Dès août 1793, Barère avait souligné à la Convention que le “pain et la poudre étaient
essentiels à la guerre” ; en Vendée il manquera les deux aux Républicains.
Habiter près des
grandes routes prédisposait aux tueries, rafles et
fusillades.
Dès les premiers mouvements des colonnes, les soldats brulent
les campagnes avoisinant les routes.
RJS : Les administrateurs du directoire du district de
Chollet, réjugiés à Angers, déclarent à la Convention nationale à Angers :
”Toutes les villes, bourgs et villages sur les grandes routes devinrent les
premiers autant de monceaux de ruines et de cendres ; les communes situées près
et au milieu des bois furent les dernières conservées. »
AR / Beaudesson, le commissaire aux vivres, suit les soldats. Il témoigne de visions d'«
horreurs »,
« le long de la route de Cholet à Vihiers, qui
était jonchée de cadavres, les uns morts depuis trois à quatre jours, et les autres
venant d'expirer. Les yeux ne se portaient partout que sur des images
sanglantes ; partout les champs voisins du grand chemin étaient couverts de victimes égorgées ».
AR / Le massacre perpétré par Huché et sa colonne en juillet 1794
confirme cette macabre pratique des troupes républicaines. En se portant du
côté de Vieillevigne, ils raflent
« une
vingtaine d'individus des deux sexes pris à leur ouvrage et tués sur le chemin,
sans compter ceux que les tirailleurs tuaient à droite
et à gauche ». « Des hommes ramenés sur le bord du chemin, on les tuait à coups de fusils et de sabres. »
Les ordres de Huché à sa troupe étaient précis, il fallait « tuer le long de la route, hommes, femmes et enfans, ce
qui a été exécuté », alors que ceux-ci ne se méfient plus des colonnes
en ces temps de première pacification et de moissons.
Le général Huché l'a voulu ainsi, parce que les routes permettent un
rassemblement plus rapide des futures victimes et des exécuteurs. Laissés là,
les fusillés sont autant d'avertissements pour l'ensemble de la population
vendéenne.
C’est
seulement en 1848 que fut réalisée la route du Fief vers Beaupréau, en 1873
celle du Fief à la Chapelle du Genêt et en 1870 du Fief vers Villedieu la
Blouère.
Ci-dessous les rapports quotidiens effectués au général Turreau par
les généraux des colonnes à partir du 21 janvier 1794, début des colonnes
infernales.
Lorsque ces rapports sont extraits du recueil de Jean Savary
ils sont précédés de la mention RJS.
Je me suis surtout intéressé aux colonnes qui ravagèrent les Mauges, mon pays
natal, d’abord celles de Boucret et Caffin, puis à la suite celles des autres généraux
ayant dévasté ce pays.
J’ai mis en rouge les exactions contre les biens et en rouge+gras
les crimes contre les personnes.
Le 16 janvier 1794, Turreau écrit aux représentants en mission auprès de l'Armée de l'Ouest :
“Mon intention est bien de tout incendier,
de ne réserver que les points nécessaires à établir les cantonnements propres à
l'anéantissement des rebelles... Mais cette grande mesure doît être prescrite
par vous, je ne suis que l'agent passif des volontés du corps législatif que
vous pouvez représenter dans cette partie.
Vous devez également prononcer d'avance sur le sort des femmes et enfants que
je rencontrerai dans ce pays révolté. S'il faut les passer tous au fil de
l'épée, je ne puis exécuter une pareille mesure sans un arrêté qui mette à
couvert ma responsabilité.
Daignez citoyens Représentants me répondre
d'une manière précise sans quoi je serai forcé d'attendre pour agir les ordres
du Comité de Salut Public.”
Il fit deux nouvelles demandes de
confirmation mais n’obtint une réponse timide que le 8 février, alors que la plus grande partie des Mauges était rayée
de la carte.
Le 17
Janvier 1794,
"afin que pendant un an, nul homme, nul animal ne trouve sa subsistance
sur ce sol" rapporte le député Fayau.
Le général Rossignol s’écrit « il
faut faire de ce pays un désert, et le peupler de bons Républicains ».
"Le comité, dit Barrère, dans un rapport, a préparé des mesures qui tendent à exterminer cette race rebelle des Vendéens, à faire disparaître leurs repaires, à incendier leurs forêts, à couper leurs récoltes. C'est dans les plaies gangreneuses que le médecin porte le fer. C'est à Mortagne, à Cholet, à Chemillé, que la médecine politique doit employer les mêmes moyens et les mêmes remèdes. Détruisez la Vendée, et vous sauvez la patrie.”
Les colonnes infernales commenceront leur œuvre le 21 janvier 1794, jour du premier
anniversaire de la décapitation de Louis XVI.
Turreau déclare au Comité de Salut Public :
RJS : "... Chaque chef de colonne a son
instruction particulière ; tous ont l'ordre d'incendier
les villages, métairies, forêts, etc., mesure que j'ai cru
indispensable... J'ai excepté cependant de l'incendie général ces quelques
villes ou bourgs dont l'existence est absolument nécessaire pour y placer des
garnison : Clisson, Machecoul , Bressuire, St-Florent, Chalonnes,
Argenton-le-Peuple, Montaigu et Chantonnay, Fontenay-le-Peuple, La
Châtaigneraie, St-Vincent, Ste-Hermine, Chollet,
Cette promenade militaire sera finie le 3 ou 4
février 1794.”
Il poursuit :
RJS : "Je le répète, citoyens
représentant, je regarde comme indispensable la mesure de brûler villes,
villages et métairies, si l'on veut entièrement finir l'exécrable guerre de la
Vendée ; sans quoi, je ne pourrais répondre d'anéantir cette horde de brigands,
qui semblent trouver chaque jour de nouvelles ressources. J'ai donc lieu
d'espérer que vous l'approuverez. Je vous demande la grâce de me répondre par
le même courrier. J'ai d'autant plus besoin de votre réponse que je me trouve
dans ce moment-ci abandonné de vos collègues, les représentans du peuple, près
cette armée, malgré mes sollicitations ?
Cette dépêche resta sans réponse, mais la machine infernales était lancée...
Déroulement des opérations dans les
Mauges et autour.
Le 19 janvier 1794, Turreau
envoie à ses généraux les instructions suivantes :
« Instruction relative à l'exécution des ordres donnés par le
général en chef de l'armée de l'Ouest, contre les brigands de la Vendée :
Il sera commandé journellement et à
tour de rôle un piquet de 50 hommes pourvu de ses officiers et sous-officiers,
lequel sera destiné à escorter les pionniers, et leur fera faire leur devoir.
L'officier commandant ce piquet prendra tous les jours l'ordre du général avant
le départ, et sera responsable envers lui de son exécution; à cet effet il
agira militairement avec ceux des pionniers qui feindraient de ne point
exécuter ce qu'il leur commanderait, et les passera au fil de la baïonnette.
Tous les brigands qui seront trouvés les armes à la
main, ou convaincus de les avoir prises pour se révolter contre leur patrie,
seront passés au fil de la baïonnette. On en agira de même avec les filles,
femmes et enfants qui seront dans ce cas. Les personnes seulement suspectes ne
seront pas plus épargnées, mais aucune exécution ne pourra se faire sans
que le général l'ait préalablement ordonnée.
Tous les villages, métairies, bois, genêts et
généralement, tout ce qui peut être brûlé sera livré aux flammes, après
cependant que l'on aura distrait des lieux qui en seront susceptibles,
toutes les denrées qui y existeront ; mais, on le répète, ces exécutions
ne pourront avoir leur effet que quand le général l'aura ordonné. Le général
désignera ceux des objets qui doivent être préservés de l'incendie.
Il ne sera fait aucun mal aux hommes, femmes et enfants en qui le général
reconnaîtra des sentiments civiques, et qui n'auront pas participé aux révoltes
des brigands de la Vendée ; il leur sera libre d'aller sur les derrière de
l'armée, pour y chercher un asile, ou de résider dans les lieux préservés de
l'incendie. Toute espèce d'arme leur sera cependant ôtée, pour être déposée
dans l'endroit qui sera indiqué par le général. »
Dans son décret du
1er août 1793 de la loi sur l’anéantissement de la Vendée, la Convention
précisait :
”L'humanité ne se plaindra
point : les vieillards, les femmes, les enfants seront traités avec les
égards exigés par la nature et la société. »
Chaque général écrira
le 20 janvier son ordre à ses
troupes qui se lanceront le lendemain sur le pays.
Le général Grignon mentionne par
écrit à ses adjoints :
«Je vous donne l’ordre de livrer aux flammes tout ce
qui sera susceptible d’être brûlé, et de passer au fil de la baïonnette tout ce que vous
rencontrerez d’habitants sur votre passage. Je sais qu'il peut y avoir quelques
patriotes dans ce pays ; c'est égal, nous devons tout immoler. »
On va suivre d’abord,
plus particulièrement, la 3ème division, confiée au général Boucret ;
cette division sera coupée en deux colonnes qui partent de Cholet,
l’une par Chatillon vers les Epesses, commandée par Boucret lui-même
l’autre par Maulévrier vers St Laurent, commandée par le général Caffin.
La 3ème demi-colonne de Caffin, adjoint
de Boucret :
Le 26 décembre 1793, Commaire écrit depuis Saumur à François-Xavier Audouin, adjoint du ministre de la guerre pour lui parler de diverses affaires de la guerre.
Vers la fin de sa missive, il annonce :
"J’ai fait filler par Chollet environ 1500 hommes commandés par le général Caffin... qui feront tous ce qui dépendra deux pour exterminer le reste de cette race impure. "J’ai donné des ordres pour empêcher qu’ils trouvent aucune subsistance. Les ordres les plus formels sont aussy donnés pour qu’on épargne rien et qu’on ne laisse rien au pouvoir des brigands fuyards sous peine d’être regardés comme traitres à la patrie ; tu peux être sûre que je ne négligeray rien pour accélérer leur perte, nous serons purgés de cette horde détestable. »
Le 21 janvier 1794, le général Caffin qui commandait la
2ème colonne de la 3ème division, , pouvait écrire à son chef, depuis Maulévrier
:
RJS : "Point de
métairies, bourgs et villages sur la gauche, et sur la droite, à une lieue de Maulévrier
où je suis, qui n'aient élé visités. Partout on y rencontre des grains et fourrages
en quantité. Ne trouvant pas suffisamment de charrettes pour en faire
l'enlèvement, je n'ai pu incendier. Je fais charger ici tous les grains, foins
el subsistances qui, je crois, seront évacués demain. Je n'attends que ce
moment pour incendier
tout. En
attendant je
purge le pays de tout ce qu'iI peut y avoir de gens suspects, sans en ménager aucun.
J'ai envoyé au village de Chambreville (Echaubrognes) sur la gauche de Maulévrier,
un détachement de cent hommes, afin d'incendier tout ce qui pouvait l'être, selon tes ordres... ce que
l'on n'a pu mettre à exécution rapport à la grande quantité de grains et de
fourrages qui s'y trouvent, ne pouvant les faire enlever par défaut de
charrettes. Ainsi, j'attends tes ordres pour savoir si je marcherai demain,
avant que toutes ces subsistances ne soient enlevées et que le pays ne soit
purgé.
Je t'observe que ma destination n'est que pour St-Laurent et que je n'en
suis éloigné que de trois lieues »
On
lit dans les mémoires de Madame de Sapinaud qui, travestie en vieille
mendiante, était alors à St-Laurent :
"Nous
restâmes pendant deux jours sans aucune alerte, mais nous apprîmes de bien
mauvaises nouvelles : les bleus
avaient fusillé vingt-cinq hommes de Maulévrier qui furent dénoncés par les
patriotes de l'endroit... Cette boucherie m'affecta beaucoup, je ne pus pas
dormir de la nuit. »
Le 23 janvier 1794,
le général Caffin est
toujours à Maulévrier qu'il a pillé ainsi que les villages des
alentours. Il écrit à son “collègue” Boucret :
RJS : “ Depuis deux jours il est parti
environ 200 charretées de grains, sans compter les fourrages. Personne ne
pourrait croire la quantité de grains qui se trouvent dans les environs ; on en
découvre partout et j'ose t'assurer que six cents charrettes ne serviraient
qu'à éclaircir le pays.
“ Tu ne penses peut-être pas que Maulévrier, Les Chambrolles (Les
Echaubrognes) et Yzernay,
distantes d'un quart de lieue l'un de l'autre, composent plus de quinze cents
maisons, sans compter les métairies.
Lorsque incendieray, je ne veux pas qu'il reste vestiges, et je commence ce matin par les églises et chapelles et les
maisons évacuées.
Ce matin, je
fais fusiller 14 femmes et
filles.."
“J'ai demandé, au Commissaire chargé de l'enlèvement
des subsistances, 400 chartes pour accélérer mon opération...”
Le 24 janvier, Caffin est bloqué à Maulévrier par manque de charrettes pour enlever les subsistances.
RJS : "J'ai perdu hier une journée entière faute de charrettes.
Aujourd'hui j'en fais charger soixante-cinq au bourg des Echaubrognes,
je doute encore si elles suffiront pour enlever toutes les subsistances , et si
je pourrai allumer... S'il ne me restait que les brigands, je partirais de
suite, car je les ai bien éclaircis, et si je n'en avais pas besoin pour
conduire les charrettes, je ferais tuer le reste.
"Donne tes ordres , je t'en prie, général, pour faire filer des charrettes de ce coté-ci. Je crains d'être forcé de partir avant que toutes les subsistances ne soient enlevées, et par conséquent de ne pouvoir incendier, voulant suivre tes ordres strictement."
Le 25 janvier, Caffin détruit le bourg des Echaubrognes et
écrit à Turreau :
RJS : “Aujourd'hui je vais commencer à évacuer Yzernay. J'y envoie toutes les charrettes, elles ne suffiront pas; mais on peut faire deux tours à Maulévrier où j'établis un dépôt, d'après l'approbation que tu as donnée à la proposition de Beaudesson. Le magasin de grains est établi dans l'église et celui des fourrages sous les halles, cela ne m'empêche pas d'incendier, vu qu'il n'y a pas de grandes communications.
"Pour le bien de la République, les Echaubrognes
ne sont plus, il n'y reste pas une seule maison.
On y a trouvé six volontaires assassinés et des fusils de munition. Rien n'a échappé à la vengeance nationale. Au
moment où je t'écris, je fais fusiller quatorze femmes qui m'ont été dénoncées.
"Je te préviens que je n'ai ni meuniers ni boulangers pour les subsistances de la troupe ; ils sont tous en fuite. Le pain sera dur demain, et il n'y en a pas ici."
Le 26 janvier, Caffin détruit les métairies entre La Tessoualle
et St Laurent sur Sèvre. Il commence à incendier Maulévrier.
RJS : "Un détachement de cent cinquante hommes, qui est resté à la Tessouale, a fait évacuer et incendier toutes les métairies qui sont sur la route de St-Laurent, où je dois me rendre demain, et où j'attendrai de nouveaux ordres. Pour ne pas perdre de temps, en attendant le détachement que tu m'annonces, je fais évacuer sept à huit métairies à l'entour de la ville , afin de les incendier. Je ne fais brûler, comme tu me l'as ordonné, que lorsque je suis assuré qu'il n'y a plus de subsistances. J'espère avoir ce soir plus de deux cents bœufs et vaches. Tous les bestiaux sont épars dans les champs.
"Hier, j'ai fait brûler tous les moulins que j'ai vus, puisque tous les meuniers et boulangers m'ont abandonné ; mais aucun de ceux que je rencontrerai n'échappera à ma vengeance.
Aujourd'hui je peux faire brûler, sans courir de risque, les trois quarts de la ville, il ne faut pas tant de place pour un détachement de deux cents hommes.
"Malgré tous les soins que je me suis donnés, je n'ai pu faire évacuer encore toutes les métairies qui sont entre Maulévrier et les Échaubrognes. II reste encore le bourg d'Yzernay et les métairies auxquels on n'a pas touché, encore plus riches, dit-on, que les Échaubrognes. En conséquence, je donnerai au détachement des renseîgnemens et des ordres à ce sujet, comme tu me le marques. »
Le 27 janvier Caffin se dirige vers St Laurent sur
Sèvre puis apprenant que les "brigands" ne sont pas loin, il
revient à Maulévrier, patrouille dans les landes Genty et fouille
l'entrée de la forêt de Vezins. Il
fait incendier le bourg de Toutlemonde.
RJS : "La tête de ma colonne était déjà sur la route de St-Laurent, lorsque ta lettre, qui m'annonçait la position de l'ennemi, m'a été remise. Le détachement que tu m'as envoyé pour garder les magasins, n'étant que de 200 hommes, dont la moitié sans armes, j'ai jugé que j'étais obligé de faire rétrograder ma troupe. J'ai été prendre une position sur les routes de Vezins et de Chemillé. J'ai de suite envoyé un piquet de cavalerie à la découverte. À peine arrivé dans les landes Genty, il a aperçu l'ennemi et l'a débusqué. Voyant l'ennemi rentré dans le bois et ne connaissant pas sa force, il y s'est replié sur la colonne que j'ai fait avancer jusqu'à la lande où j'ai pris position. Un détachement du 77ème, envoyé en avant, a reconnu le bivouac des brigands dans le bois à côté de la lande ; il a pris 18 chevaux que tu recevras demain matin. Le bois a été fouillé, les brigands n'ont pas paru, leur corps-de-garde a été brûlée ; mais je ne puis te dire leur direction."
“Voici une preuve de leur scélératesse : on a
trouvé dans leur bivouac un père et son fils
massacrés, attachés l'un à l'autre."
Ceci ne m'a pas empêché de faire l'enlèvement des grains, quoique tous les
coquins de préposés soient partis. J'ose assurer que si j'avais quitté Maulévrier, l'ennemi aurait égorgé le détachement
de 200 hommes, car il est instruit de tous nos mouvements, aussi je fais tuer tout ce que je rencontre."
Le 28 janvier, Caffin fait éclairer par des
patrouilles les routes de Vezins et d'Argenton.
RJS : "Je te préviens que j'ai fait éclairer ce matin les routes de Vezins et d'Argenton. Mes patrouilles n'étant pas encore rentrées, je ne puis te donner aucune nouvelle sur la marche des brigands. Je t'annonce que je n'ai plus que pour un jour de pain et de farine."
Le 29 janvier, Caffin termine l'incendie de Maulévrier
et d'Yzernay et part pour St Laurent sur Sèvre.
RJS : "Hier, vers une heure après midi, mes postes avancés sur les routes d'Argenton et de Vezins ont entendu battre la charge ; j'en ai été instruit aussitôt, et je suis allé prendre position sur la route de Vezins, mais on n'a rien découvert (1).
"Ce matin, à la réception de ta lettre, j'ai fait battre la générale, et je me mets en marche à sept heures pour fouiller la forêt de Vezins, conformément à tes ordres.
"Je n'ai reçu de pain que pour la distribution d'aujourd'hui, il sera dû demain ; je t'en préviens, afin que tu donnes des ordres en conséquence."
(1)
C'est dans ce
moment, le 28, que la Rochejaquelein fut tué par un volontaire qu'il
poursuivait.
Le 31 janvier, Caffin termine l'incendie de Maulévrier
et d'Yzernay et écrit à Turreau
qui devait quitter Cholet le
lendemain 1er février :
RJS : "Je te préviens que tout le village d'Izernay a été incendié hier (le 30) sans y avoir trouvé ni homme ni femme. Il restait quatre moulins a vent que j'envoie incendier ce matin, n'en voulant pas laisser un seul.
"Pour seconder tes désirs, je pars aujourd'hui pour St-Laurent que j'espère brûler demain, pour me rendre après-demain à la Verrie, où je dois rester jusqu'à nouvel ordre.
"J'ai fait brûler ce matin toutes les maisons qui restaient à Maulévrier, sans en excepter une seule, si ce n'est l'église où il y a encore beaucoup d'effets qu'il serait à propos d'envoyer chercher de suite."
“Le bourg de Toutlemonde a été incendié avant-hier.”
"Tu observeras au citoyen Beaudesson que je laisse encore quantité de grains et de fourrages dans les métairies que je n'ai pas fait brûler."
Le 31 janvier Turreau
écrit au Comité de Salut Public:
RJS : “ Elles (les colonnes ont passé au fil de la
baïonnette tous les rebelles épars qui n'attendaient qu'un nouveau
signal de rébellion...
On a incendié
métairies, villages, bourgs... On ne peut concevoir l'immensité de grain
et fourrages qu'on a trouvés dans les métairies et cachés dans les bois.
« J'aî donné les ordres les plus précis
pour que tout soit enlevé de ce maudit pays et porté dans les magasins de la
République.
Il est parti ce malin pour Saumur un convoi tenant près de deux lieues de
long... »
Le 1er février, à 5 heures, Caffin est à St Laurent sur Sèvre. Il fait sabrer et empaler deux religieuses de la Sagesse, trois frères coadjuteurs de la Compagnie de Marie, puis fait
fusiller quinze hommes du village.
Enfin le feu est mis à tout le village.
RJS : "Je suis arrivé ici à cinq heures. St-Laurent étant assez considérable, il me faudrait au moins deux jours pour purger ce pays ;
"II reste encore beaucoup de monde à St-Laurent ; mais, comme je sens que je
serai beaucoup plus utile à la Verrie
qu'ici, je m'y rendrai demain le plus promptement possible, et je ferai comme à
Maulevrier, je
brûlerai avant de partir."
Toujours à St Laurent qu'il fait fouiller entièrement, il écrit le même
jour :
RJS : “A midi je t'écris
encore de St-Laurent... Depuis ce matin, je suis occupé à faire faire
toutes les fouilles et les recherches qu'il m'est possible. Il vient de m'être
apporté par des républicains un tas d'argenterie que je
t'envoie sur-le-champ par le commandant de la Haute-Saône qui te donnera
la liste des républicains qui me l'ont remis.
Comme je veux absolument me rendre a la Verrie, ce soir, je crains de ne
pouvoir incendier tout comme je désirerais...
J'ai fait conduire à Cholet 32
femmes qui étaient dans le couvent ; je les ai adressées aux administrateurs du
district qui en feront ce qu'ils voudront...
J'ai trouvé une vingtaine d'hommes de reste que j'ai
fait fusiller avant de partir. Si j'en trouve d'autres dans ma
route, ils essuieront le même sort... »
Caffin part pour La Verrie où il arrive à 7
heures et qu’il fouille le 02 février.
Le 2.février en arrivant à la Verrie
RJS : “ Pour me rendre plus
promptement à ma destination, je me suis dépêché le plus que j'ai pu de brûler tout St-Laurent. Je suis arrivé hier au soir,
sur les sept heures, à la Verrie. Ce matin je m'occupe à faire faire les
recherches les plus scrupuleuses. On trouve dans tous les jardins et maisons
des gargousses et des balles, aussi j'arrangerai en conséquence ceux qui
restent. Je resterai ici jusqu'à nouvel ordre. »
Le 3 février il annonce la présence de
4.000 "brigands" à La Gaubretière
RJS : ".... Je te préviens que j'irai demain
matin avec ma colonne brûler ce bourg, tuer tout
ce que j'y rencontrerai sans distinction,
comme le repaire de tous les brigands. Je n'avais pas encore occupé un pays où
je pusse rencontrer autant de mauvaises gens, tant hommes que femmes; aussi tout y passera par le fer et
par le feu...."
Le 4 février, Turreau lui donne
l'ordre de rejoindre Cholet. C'est Boucret qui "fera le travail" à La Gaubretière,
Le 8 février, Caffin
est grièvement blessé lors de la bataille de Cholet.
La 3ème demi-colonne de Boucret :
Le 21 janvier,
le général Boucret écrit :”J’ai bivouaqué à la Tessouale, demain je bivouaquerai à
Moulins”
Le 22 janvier, le général Boucret ravage la Tessoualle, et massacre la population qu’il rencontre, comme nous le
raconte Louise Barbier dans ses mémoires.
RJS : “ Le général Boucret était à la Tessoualle, à dix kilomètres et brûlait tout le bourg et l'église. Il fit mettre le feu dans un grand champ de genêts,
dans le bas des Juchellières (Gingelières), où tous les habitants étaient
réfugiés et il faisait tirer sur ceux qui voulaient s'échapper. Mon frère Louis, qui y
travaillait à tisser de la toile, se sauva en traversant la rivière et arriva
nous raconter ce massacre où périrent plus de soixante personnes. »
Le même jour, Moulins est en partie brûlé par Boucret
mettant le feu partout et égorgeant tout sur son passage.
Il écrit :
RJS :”Je n'ai rien
de nouveau sur la position de l'ennemi. Le pays que je parcours est
suffisamment fourni de vivre pour la troupe.
Je trouve dans toutes les métairies quantité de pain cuit. Je n'ai besoin que
de voitures pour faire charger les grains.
Sois tranquille sur ma marche, et sois persuadé que je ne me laisserai pas
surprendre : je serai demain à St-Jouin ou Châtillon. »
Le 23 janvier, Boucret est arrivé à Chatillon
RJS : “J’ai
étendu ma chaîne depuis Moulins jusqu'à ChâtilIon ; j'ai laissé à
la Tessoualle 200 hommes, jusqu'à l'arrivée du général Caffin je ne partirai de Châtillon que le 25.
Je me diviserai en deux colonnes, l'une partant de Châtillon pour se rendre au
Temple, l'autre de Châtillon à la Boissière, qui correspondra
avec celle de *** qui devra se trouver à la Pommeraie.”
“Je serai le 27 aux Épesses ou j'attendrai de
nouveaux ordres. Toute la partie que j'ai parcourue a été exactement fouillée ;
il ne reste rien à désirer. J'ai deux fois fait en petit ce que nous faisons en
grand ; rien n'a échappé à ma surveillance. Je ne sais pas ce que c'est que
d'écrire laconiquement (1). Sois sur, général, que je ferai toujours mon
possible pour mériter ta confiance.”
(1)
Turreau lui reprochait le peu de détails dans ses actions
Le 24 janvier, de Chatillon, Boucret écrit :
RJS : “Je
t'envoie 32 pièces d'église, dont 7 trouvées par deux volontaires, et 25 trouvées par moi dans un
caveau. Il me manque des voitures, je laisse quantité de grains sur mes
derrières. J'ai fait pousser des patrouilles de cavalerie sur toutes les routes
et issues : on n'a rien trouvé.”
”Je n'ai point de nouvelles sur la position des brigands. Je partirai de Châtillon demain 25”
Le 25 janvier, de St Amand, il
poursuit :
RJS :”J'ai
donné des ordres pour qu'il soit chargé deux voitures de linge trouvé dans une cave. J'ai laissé sur mes
derrières quantité de grains mais j'ai pris le nom de toutes les métairies, et
j'espère que tu m'enverras des voitures pour les faire enlever. Je n'ai rien de
nouveau sur la position des brigands.”
Le 26 janvier depuis les Epesses
RJS :”Je suis arrivé aux Épesses à cinq heures du soir.
J'ai fait assembler les officiers municipaux pour me faire donner des
renseignemens sur la position des brigands ; ils ne la savent pas positivement,
mais ils ont dit qu'ils les croyaient aux Herbiers. J'ai requis la municipalité de
me faire cuire du pain ; nous avons quantité de farine et point de voitures. Je
n'ai besoin de rien pour la nourriture mais les soldats sont nus et sans
souliers.”
Le 28 janvier, toujours aux Epesses
RJS :”Je suis
instruit par des préposés que les soldats sortent de Chollet et pillent les voitures avant qu'elles
n'arrivent.”
“ Deux soldats ont trouvé
dans le tronc d'un arbre un prêtre non assermenté ; je l'ai fait fusiller. Il avait sur lui 15
louis, tant en or qu'en assignats et une montre d'or. J'ai donne aux deux
volontaires pour récompense, 100 livres ; je suis porteur du reste.”
“Je te fais passer deux
voitures, dans l’une, 22 fusils et du grain ; dans l'autre un coffre renfermant
63 pièces,
tant d'église que linge, plus une croix d'argent doré. Je fais escorter le tout par quatre
gendarmes.”
Le 28 janvier, toujours aux Epesses
RJS : « Les boulangers ne peuvent
pas me fournir le pain nécessaire pour ma troupe. Je te prie de m'en faire
passer 2 000 rations pour me mettre en avance. Je n'ai rien de nouveau sur la
position de l'ennemi..”.
Le 31 janvier, depuis Chambretaud
RJS : “ Je
suis arrivé à Chambretaud à trois heures et demi ; les brigands
occupaient ce poste qu'ils ont quitté hier à neuf heures du matin. D'après tous
les rapports, ils sont à la Gaubrelière.
Je te prie de me faîre passer des voitures ; j'ai beaucoup de grains à
envoyer.”
Le 4 février 80 hommes et femmes se
réfugient dans le clocher de l’église de
En dehors du contexte
exact des colones infernales, le 5
avril, la colonne de Boucret se signale de nouveau par des ravages à Vihiers, Gonnord, Joué, Montilliers, Cernusson, Tigné, Faveraye-Mâchelles et Aubigné-sur-Layon.
15 femmes et
enfants sont tués dans les bois
de la Frappinière.
22 femmes et enfants sont capturés puis massacrés au Moulin de la Reine,
près de Montilliers, et seuls
deux enfants s’échapperont, Marie Clemot et son petit frère.
Marie Clemot est
l’arr-gd-mère de Joseph
Gelineau, prêtre et donateur du vitrail de l’église de Montilliers.
Ci-dessous la
progression des autres colonnes et les exactions commises par celles-ci. (liste
naturellement non exhaustive)
La 4ème colonne de Turreau et Bonnaire
Ces deux colonnes se dirigent presque parallelement de Doué
à Cholet.
Le 21 janvier,
la 8ème demi-colonne, commandée par le général de brigade Louis Bonnaire, part de Doué-La-Fontaine
et arrive à Concourson-sur-Layon, qui est incendié.
Elle est ensuite divisée en deux demi-colonnes.
La première passe par Bitaud et Vaillé
pour arriver aux Cerqueux-sous-Passavant qui est incendié et dont les habitants sont massacrés.
La seconde passe par Cernusson, où le maire
et environ 40 habitants sont fusillés, pour arriver à Montilliers
où environ 30 femmes et enfants sont passés par les armes également.
Le 21
janvier au soir, Bonnaire écrit à Turreau, depuis Vihiers
RJS : “J'ai
employé tous les moyens en mon pouvoir pour exécuter les ordres que tu m'as
donnés. Je n'aurai point à me reprocher les circonstances qui pouvaient en
assurer l'exécution.
La colonne étant arrivée
entière à Concourson, j'ai détaché sur ma gauche, d'après ton
instruction, le général *** , et sur ma droite, trois bâtaillons chargés d'incendier les villages désignés.
Malgré la célérité qu'ils ont mise dans leur marche pour leurs opérations, deux
de ces bataillons ne sont rentrés qu'à dix neures du soir, et le troisième ne
l'est pas encore à minuit.
Le général *** a laissé
aussi un bataillon aux Cerqueux, parce qu'il y a trouvé quelques denrées. On en a
trouvé aussi dans un autre village où un bataillon a été forcé de rester. On a
arrêté dans ce même village 25 hommes soupçonnés d'avoir porté les armes» chez
les brigands : je les ai fait incarcérer dans la prison de Vihiers, afin que l'on pût
distinguer et punir les coupables.
« Je n'ai pu avoir aucun
renseignement sur la position que l'ennemi occupe en ce moment. Demain
j'arriverai, je pense très tard à Chollet, vu les détours que les troupes sont
forcées de faire pour l'exécution de tes ordres.»
Le 22
janvier depuis Cholet, Turreau peut lire :
RJS :” A Concourson, sa colonne se sépara de
celle du général Bonnaire, et se porta sur la gauche au bois de Bitaud pour l'incendier, ce qui fut de toute
impossibilité.
Le feu fut mis
au tournebride du château de Bitaud et à plusieurs petites maisons dans les environs.
La colonne se rendit au village de Valier où le général prit avec la municipalité les moyens
d'emmagasiner les grains qui étaient dans le château; il en fit porter une
partie chez un officier municipal, étant obligé de faire mettre le feu au château. Le village fut brûlé.
“La colonne se porta
ensuite sur les Cerqueux, en brûlant sur la route toutes les maisons qu'elle trouva. Arrivé aux Cerqueux a 8 heures du soir, le
général y laissa un bataillon avec ordre au commandant de faire le recensement
des grains et fourrages ; de déposer les grains dans les maisons les plus
patriotes, de
mettre le feu aux autres et de rejoindre ensuite la colonne, en rapportant des certificats des
officiers municipaux.
» Le 22, après avoir fait
emmagasiner les blés, qui se trouvaient à St-Hilaire du Bois, dans quelques maisons
sous la responsabilité des officiers municipaux, le feu fut mis au reste du village.
Durant cette opération , la colonne marchait sur Coron, brûlant de droite et de gauche tout
ce qui se trouvait sur sa route sans grains. La municipalité vint au-devant du
général offrir de rassembler avec le plus de célérité possible les grains et
fourrages que cette commune possédait, ce qui fut accepté.
» Le général se porta
ensuite sur Vezins où il laissa 4 compagnies, et rendit la
municipalité responsable de tout retard dans le rassemblement des différens
comestibles de la commune.
. » Le général, ayant jugé qu'il serait trop tard pour sa colonne de passer par
la forêt de Vezins, détacha deux bataillons pour brûler cette forêt et le village de
la Poterie,
comme repaire dé brigands et pendant ce
temps-là sa colonne s'est portée à Chollet, brûlant de droite et de gauche châteaux maisons, etc. , où il n'y avait pas de
grains. »
La « 1ère Promenade de Turreau » s’arrêtera dans un premier
temps à Cholet d’où il put observer tous les ravages de ses colonnes ;
il pense alors que cette opération “militaire” metra fin aux combats en Vendée
dès les premiers jours de février 1794.
Pourtant ses exactions continueront bien après le 8 février, date de fin
officielle des “colonnes infernales”.
La 5ème demi-colonne de Cordellier.
Le 22
janvier au soir, Cordellier écrit à Turreau, depuis Beaulieu
sur Layon :
RJS : « Je
suis arrivé aujourd'hui à Beaulieu, citoyen général, et (Crouzat) à Thouarcé. Nous avons tous deux exécuté tes ordres ;
mais il nous a été impossible, malgré les abattis que nous avons fait faire, de
propager
l'incendie dans les bois. La fouille en a été infructueuse.
Je le dirai qu'en
arrivant à Beaulieu nous y avons trouvé la garde nationale sous les
armes, drapeau déployé ; cela ne m'empêchera pas, en me conformant à ta lettre
du 20, de me faire remettre ces mêmes armes que j'emploîrai d'abord à armer
ceux de mes soldais qui ne le sont pas, avant de les envoyer sur les derrières.
» Je suis
particulièrement logé chez un ex-constituant, maintenant président d'un
district, que l’on nomme Desmazières, qui n’est pas présentement chez lui, qui
a déjà été pillé, et que je ne puis cependant pas épargner, d'après les
ordres.que j’ai reçus.
» Je sors à l'instant de
sommer la municipalité de me déclarer s'il existait des contre-révolutionnaires
dans la commune ; elle m'a déclaré qu'il n'existait que des femmes dont les
maris s'étaient réunis aux brigands ; comme elles me paraissent suspectes, je
leur ferai donner demain leur déjeuner.
» Les armes vont m'être
remises ce soir.. »
Le 23 janvier à la Jumellière
RJS : « Je
suis arrivé aujourd'hui, mon cher camarade, à la Jumellière et (Crouzat) à Gonnord. Je me suis chauffé très amplement ce matin,
avant de partir de Beaulieu, de même qu'en passant à St-Lambert où je n'ai pas trouvé de
subsistances ; je pense que (Crouzat) en aura fait de même. Il est six heures du soir,
et je n'ai pas encore reçu de ses nouvelles; je vais lui écrire en conséquence”
» Je t'informe que je
séjournerai demain ici, pour n'en partir qu'après-demain, attendu, que je suis
informé qu'il existe encore des brigands dans les bois qui se trouvent entre Chemillé et la Jumellière, et que j'ai des
opérations à faire dans les environs, particulièrement dans le village de Chanzeaux infesté de rebelles ou
de gens suspects.”
» Je dois aussi te dire que ceux qui m'ont instruit qu'il existait des rebelles
dans les bois sont deux particuliers du bourg de Chemillé, qui sont venus me parler
aujourd'hui, en se couvrant du voile du patriotisme. Ces deux hommes qui
étaient montés ne m'informèrent pas d'abord de ce dont il s'agissait, et ce
n'est que lorsqu'ils furent partis pour retourner à Chemillé, qu'un d'eux, nommé Thubert,
vint me dire que son camarade venait d'être arrêté par environ 25 hommes armés,
dans les bois qui se trouvent sur la route sans qu'il ait été tiré un coup de
fusil. J'ai envoyé sur-le-champ des patrouilles de ce côté pour s'assurer du
fait, et j'ai en même temps mis de côté ledit Thubert que j'ai interrogé et qui
m'a paru infiniment suspect, avec d'autant plus de raison que c'est un prêtre.
J'attends qu'il me soit rendu compte de ce qu'auront vu les patrouilles pour
prononcer sur son sort ; mais je crois que son compte est bon..”
» Je ferai séjourner (Crouzat) à Chemillé où il sera demain pour
n'en partir que le 26, et se rendre en deux jours au May.
A mon égard, je compte aussi n'être à Jallais que le 27. Tu penses bien que,
pendant nos différents séjours, nous ne nous tiendrons pas à rien faire.
» L'adjudant général
Flavigny que tu m'as adjoint se comporte en bon militaire. ”
Le 23 janvier, Cordellier arrive à la Jumellière,
« brûlant toutes les habitations et massacrant
toutes les personnes qu'il rencontra. »
Il arrêta aussi Thubert, l'intrus de Melay, qui, malgré les renseignements
qu'il venait de lui donner sur un rassemblement de paysans, lui paraissait, en
sa qualité ''de prêtre'' infiniment suspect.
Cordellier quitta la Jumellière le 25.... vers St-Lezin.
»
*Nous ne connaissons
pas les noms, ni le nombre exact des victimes, trente deux ou une centaine, suivant les auteurs... ?? Sauf deux : Marie-Anne Blanvilain et sa grand-mère
maternelle, Jeanne Noyer.
Marie-Anne, agée de 6 ans, reçut
plusieurs coups de sabre et de fusil, survécut mais resta très handicapée ; elle mourut en 1844, à 56 ans.
Cordellier annonce ainsi les faits à Turreau :
“J'ai brûlé toutes les maisons et tous les bois et égorgé tous les habitants que j'ai trouvés. Je préfère égorger pour
économiser mes munitions.
J'ai détruit ce matin 350 hommes et femmes, la plupart sans armes. Tous les bestiaux
ont été détruits.
Mon adjoint Crouzat, hier (en fait il s’agit du 23) au seul bourg de Gonnord, a tué 310 brigands, vieillards, femmes et enfants, mis
vivants dans le fossé. Dans ce moment 40
métairies éclairent la campagne. »
Le 25 janvier Cordellier écrit de la
Jumellière
RJS : « Je
viens de donner l'ordre à (Crouzat) d'aller incendier le village de Chanzeaux, de même que de faire
scrupuleusement la fouille des bois qui sont de ce côté. Je vais aussi faire la
même opération dans tout ce qui a voisine mon quartier-général, et j'aurai soin
de te rendre ce soir un bon et fidèle compte de ce qui se sera passé dans la
journée.
» Je ne sais s'il y a
encore des brigands dans les bois mais les mesures que j'ai prises ne me
laisseront rien ignorer.
» J'ai reçu des nouvelles
de (Crouzat) qui a brûlé dans sa journée cinq châteaux. Je l'ai autorisé à
respecter les propriétés de la citoyenne Beaurepaire dont le mari s'est
immortalisé à Verdun. Jé crois avoir bien fait, car il n'est jamais entré dans
les intentions de la république que cette bonne citoyenne soit victime des
iniquités qui se sont commises dans le village de Joué où elle fait sa résidence. ».
RJS : « J'ai
fait aujourd'hui, mon cher camarade, beaucoup de besogne. (Crouzat) arrivé de sa mission, vient de me rendre compte qu'il avait incendié le village
de Chanzeaux et tous les hameaux et métairies qui l'environnent. Il a
aussi fait fouiller les bois et n'y a rien trouvé: ainsi le prêtre dont je t'ai
parlé dans ma lettre d'hier, sera exécuté demain (1).
»(Crouzat) a encore fait passer au fil de
la baïonnette environ 30 personnes suspectes des deux sexes. II a, dans sa marche, été
obligé de faire un exemple. Un dragon du 2ème régiment, qui s'est permis
d'assassiner un vieillard patriote, parce qu'il n'avait pas d'argent à lui
donner, a été fusille sur-le-champ, sur la demande de toute la troupe qui a applaudi
à cet acte de vigueur.
Je n'ai pas désapprouvé
sa conduite, car il est constant que les troupes légères se permettent des
atrocités, et qu'elles contribuent beaucoup à mettre de l'indiscipline dans les
armées, et de tels exemples ne peuvent qu'être d'une grande utilité.
» En même temps que (Crouzat) opérait sur ma gauche,
deux détachemens de cent hommes chacun, à la téte desquels étaient mes
aides-de-camp, opéraient aussi sur ma droite.
Tout a été ponctuellement exécuté ; les châteaux , au nombre de cinq, éclairent
maintenant la campagne.
II existe dans toutes les
maisons de cette contrée une grande quantité de fourrages mais les moyens de
transport nous sont ôtés. L'état déplorable des chemins ne permet pas qu'ils
soient pratiqués par beaucoup de voitures, et c'est ce qui m'a déterminé à
m'attacher plus particulièrement à faire effectuer l'enlèvement du froment et
de l'avoine.
(1). Ce pretre était le
fils d'un notaire de Chemillé, citoyen estimable et estimé, administrateur du
département de Maine-et-Loire
RJS : » J'ai
fait amener aujourd'hui au quartier-général environ 150 boeufs pris dans les
maisons livrées aux flammes. Comme il y en a prodigieusement partout, j'ai donné l'ordre de le faire
filer sur les derrières,afin qu'ils n'entravent pas la marche des colonnes.
(Crouzat).de qui je viens de
recevoir des nouvelles, a brûlé les villages de Gonnord, Joué, Etiau, et les hameaux et châteaux
environnans;
il a fait l'exception dont je t'ai parlé dans ma dernière.
le 25
janvier, Cordellier écrit de la Jumellière
:
RJS : “ Je suis arrivé aujourd'hui au village de Neuvy
que j'ai trouvé incendié. Je n'ai
point été inquiété dans ma route mais j'ai appris par des femmes qui sont
restées dans les maisons échappées aux flammes , qu'environ cinq cents brigands,
partis armés de fusils, et d'autres de bâtons, étaieut passés à Neuvy deux heures avant mon arrivée. Il
paraît qu'ils venaient d'un endroit nommé le Moulin des Landes des Mauges, ou s'est fait ce
rassemblement.
Je ne dois pas te laisser ignorer qu'un bataillon de Maine-et-Loire, stationné
à Ste-Christine, distant d'une
demi-lieue de Neuvy, informé qu'il
existait un rassemblement de brigands de ce côté, vint les attaquer le matin ;
mais, malheureusement, il fut mis en déroute et obligé de se replier sur Chalonnes et St-Florent. Je ne sais ce qui a pu occasioner cette déroute, les
apparences seules me portent à croire que le commandant de ce bataillon s'est
maladroitement engagé dans un défilé que lui présentait le ruisseau du Jeu, où j'ai trouvé 4 à 5 volontaires
tués à peu de distance.»
Avant de partir ce matin de la Jumellière,
j'ai fait passer au fil de la baïonnette environ vingt individus tant
hommes que femmes, convaincus
d'avoir participé aux troubles qui ont eu lieu dans ce département. De tous ceux
qui composaient la municipalité, le maire seul est conservé, ayant été reconnu
citoyen.
En partant de la Jumelière, j'ai
dirigé une colonne sur le village de St-Lezin
, à laquelle j'ai attaché Crouzat. Je lui avais donné l’ordre de le livrer aux flammes et de passer au fil de la baïonnette tous les
habitants, ce qu'il m'a dit avoir
ponctuellement exécuté.”
le 25 janvier, Cordellier
écrit depuis Chemillé :
RJS : “Il est de mon devoir, citoyen général, de
t'informer de toutes mes découvertes."
” Tu trouveras ci-joint copie d’une lettre de la municipalité des Gardes, qui
vient de m'étre remise à l'instant ; dans ta sagesse tu ordonneras ce qui te
paraîtra convenable. Dans le moment où je t'écris, je fais incendier deux villages et quatre châteaux ; je donne le même avis au général (Crouzat)"
Louis Monnier, chef de la division de Montfaucon,
témoigne sur le massacre de la Jumellière,
du 25 janvier 1794 par Cordellier :
“A un
quart de lieue de la Jumellière,
j'aperçois, dans un coin du chemin, un monceau de victimes, amoncelées comme
une corde de bois, entre un chêne et un grand piquet. Il y en avait à la
hauteur d'un homme et plus de quinze pas de long, tète à pied. Ce spectacle
m’effraya, mais c’était comme rien. A cinquante pas plus loin, j'aperçois un
homme, dans le coin d'un champ de genêts, qui baissait la tête et la relevait ;
je crus que c'était l'ennemi qui était dans le champ de genêts... Ce malheureux
m'aperçut et se sauva.
Je lui criait : « Arrête ! ou tu es mort ». Il vint à moi ; je
lui dis « Que fais-tu là ? »
Il avait sa pelle sur son épaule ; il me dit « Ah ! j'ai eu grand'peur
». Il se mit à pleurer. « Voyez, me dit-il, dans le milieu du chemin, ma femme égorgée, mes cinq
enfants avec, et je suis à faire une fosse pour les mettre. » Je
fis dix pas ; j'aperçus une
femme étendue dans la boue, un enfant sur le bras gauche, un sur le bras droit,
un autre sur la jambe gauche, un autre sur la droite, et le cinquième au sein
de sa mère ; tous avaient la tête ouverte, le cerveau ôté et mis dans la poche
de tablier de la mère. Jamais aucun homme ne pourra croire une barbarie
pareille. Cependant, le fait est constant, je l'ai vu de mes yeux et j'en ai
pris note.”
Le 26, il écrit depuis Jallais
RJS : ”Je ne
suis pas plus tôt arrivé Jallais, citoyen général, que je m'occupe de te
rendre compte de ce qui m'est arrivé en route, de même qu'au général (Crouzat).
C’est avec regret que je t'apprends que nous n'ayons rien vu ni rencontré,
malgré que nous ayons l'un et l'autre traqué tout ce qui en était susceptible.”
Le 27 janvier, Cordellier, déclare depuis Jallais
RJS : “ Dans le cours de la journée, je me suis
occupé de fouiller, ainsi que tu me l'as ordonné, les environs de Jallais. Quatre détachemens de cinquante
homme chacun, auxquels j'avais attaché des officiers de mon état-major, ont
tout parcouru.
J'avais ordonné de passer
au fil de la baïonnette tous les scélérats qu'on
aurait pu rencontrer, et de brûler les hameaux et métairies qui avoisinent Jallais; mes ordres ont été ponctuellement
exécutés, et dans ce moment quarante métairies éclairent la campagne.”
“D'après le compte qui m'a été rendu, il paraît
qu'il n'existe aucun rassemblement autour de moi, et même peu d'habitans, car il
n'y en a eu qu'une dixaine de tués. Il n'en est pas de même des bestiaux, car
cette battue m'en a procuré au moins 200 que je vais faire filer sur les
derrières.
» Je ne dois pas te laisser ignorer qu'un de mes
détachements a été jusqu'au village de Beaupreau que j'avais désigné pour être incendié ; mais l'officier chargé de cette expédition m'a rendu
compte qu'un bataillon de volontaires de la première réquisition y tenait
garnison. Ce bataillon fait partie de la garnison de St-Florent.
Mes 50 hommes, ayant été pris pour des rebelles, ont mis les avant-postes en
fuite et la garnison en déroute ; ainsi, juge comme mon front serait bien
gardé, si je ne commandais pas d'excellentes troupes.
“J’apprends que le général Jacob est arrivé
à Angers, je lui donne l'ordre de me rejoindre, attendu qu'il peut
m'être d'une grande utilité.”
Le 29 janvier, Cordellier est toujours à Jallais
RJS : “Ce
matin, à sept heures, j'ai été à la découverte à une demi-heure de Jallais
sur la route de Chemillé et autres adjacentes. Je n'ai rien trouvé.
J'ignore où ces scélérats-là se retirent. On vient de m'amener deux brigands;
ils n'ont voulu rien me déclarer, alors j'ai
prononcé.... la mort.
“Je te préviens que bientôt notre troupe va manquer
de pain, s'il n'en arrive pas.»
Le 30 janvier, toujours à Jallais
RJS : “Je n'ai
pu m'empêcher, mon cher camarade, de témoigner à Crouzat mon
mécontentement de ce qu'il avait envoyé cent hommes cantonner à deux lieues de
lui, lesquels ont éprouvé un échec ; mais cela sert à nous faire croire que
l'ennemi est maintenant en avant de nous (1).
Je partirai demain pour me rendre à Montrevault, en suivant
littéralement ton instruction. Je viens d'envoyer l'ordre au général Jacob
de me rejoindre sur-le-champ avec la troupe qu'il commande. Cette troupe , au
nombre de 400 à 500 hommes, me sera d'une très-grande utilité pour couvrir ma
droite. »
(1) On
voit que le général Cordellier n'avait pas la moindre idée de la guerre de
Vendée. L'ennemi n'avait aucune position déterminée.
Le 31 janvier, à Montrevault
RJS :
“Conformément à ton ordre, citoyen général, je me suis rendu ici avec ma
troupe, accompagné de mon camarade Jacob.
J'ai trouvé à Montrevault le premier bataillon de Maine--et-Loire, dit
des pères de famille.
D'après les renseignemens que j'ai pris, l'ennemi a passé bier dans les
communes de Montigné , Montfaucon, Tillieres et Gesté où il a couché et
où il parait qu'il est encore.
Je viens de donner l'ordre à Crouzat, qui se trouvait à St-Philbert,
plus près de Geste que moi, de s'y porter et d'attaquer sur deux
colonnes.
J'ai cru devoir ordonner
au commandant du bataillon des pères de famille de rester stationnée à Montrevault
jusqu'à nouvel ordre, parce que ce point m'a paru important à conserver. Quant
à l'esprit public, il ne me parait point mauvais dans cette commune. Les
officiers municipaux paraissent patriotes et vouloir le bien de la chose, ainsi
je n'ai pas cru devoir me résoudre à incendier ce bourg. Crouzat se
rendra au Fief-Sauvin ainsi que le porte ton ordre. ».
Le 31 janvier, une branche d’une colonne de Cordellier se rendant de Beaupreau
à la Chapelle-Aubry massacre
20 à 30 personnes ramassées entre
autres à la ferme voisine de la Ragonnière, à la « Croix de l’Aigrasseau » à la sortie des
bois du château de Barot.
Le 1er février,
Cordellier au Doré
RJS : “Je n'ai
rien de plus pressé, en arrivant au Doré, que de te rendre un fidèle
compte de ce qui s'est passé aujourd'hui, tant dans la colonne de Crouzat
que dans la mienne.
Les chemins difficiles et des obstacles innombrables n'ont pas permis à Crouzat
d'arriver à Gesté avant huit heures du matin. L'ennemi, fort bien servi
en espions, s'attendait tellement à l'attaque, qu'il a attaqué lui-même la
colonne de droite de Crouzat dont partie n'a pas encore rejoint sa
colonne, et qu'il présume être allée au Fief-Sauvin sa seule retraité.
“Quant à sa colonne de gauche, à laquelle il était attaché, elle a fait
son attaque, ainsi qu'il lui était ordonné, à l'ouest de Gesté ; mais
ayant trouvé une vigoureuse résistance, et après avoir vu la victoire chanceler
et s'être battu pendant trois ou quatre heures, Crouzat s'est déterminé
à faire sa retraite sur le Doré où je l'ai trouvé. Il m'a rendu compte
qu'elle s'etait faite en très-bon ordre, malgré que beaucoup de soldats, qu'il
présume n'être qu'égarés, ne soient pas encore rentrés à leurs bataillons.”
“Quant à la colonne que je commande, elle n'est pas non plus restée dans l’inaction. Arrivé dans les Landes qui avoisinent la forêt de Leppo, j'ai mis ma troupe en bataille, afin d'observer les mouvemens de l'ennemi, et d'être à portée de donner des secours à Crouzat en cas de besoin.
Ce ne fut qu'environ une heure après m'étre formé en bataille et avoir entendu les feux de file et de peloton très-suivis qui se faisaient entendre sur ma gauche, que je më déterminai à marcher directement sur Geste, afin d'inquiéter l'ennemi, même de le prendre à revers en cas qu'il fût poursuivi par Crouzat.
» En conséquence, j'ai fait partir mon avant-garde sons les ordres de
l'adjudant-général Flavigny, et l'ai dirigée sur Geste, en lui
recommandant de ne point s'aventurer dans Geste sans avoir parfaitement
éclairé sa marche. Mes ordres ont été ponctuellement exécutés.
Flavigny, n'ayant trouvé qu'une faible résistance, est entré dans le
bourg avec son avant-garde ; il a poursuivi et mis en déroute, sur la route de Nantes,
environ deux cents brigands.
» M'étant assuré qu'il n'y avait aucun risque à traverser Geste pour gagner le Doré, j'ai pris le parti de faire exécuter ce mouvement à ma troupe. J'ai traversé ce bourg à mon aise ; mais à peine avais-je eu le temps de la former en bataille, que j'ai été informé que l'ennemi entrait dans Geste du côté de Beaupreau et de St-Philbert.
« Un bataillon de la Marne, qui formait mon arrière-garde, fut bientôt
aux prises. J'envoyai le 74ème pour le soutenir, je fis mettre un bataillon en
tirailleurs à droite
et à gauche de ma troupe, et m'étant aperçu que l'ennemi qui se trouvait en
force, avait le projet de me cerner, je ne balançai pas à ordonner la retraite,
avec d'autant plus de raison que mes tirailleurs et les bataillons de première
ligne avaient été forcés de se replier sur moi.
» Mon avant-garde me joignit alors, et je donnai de nouveaux ordres à Flavigny
pour protéger, de concert avec la cavalerie, la retraite de la colonne.
J'attachai à cette avant- garde, devenue par la force des circonstances notre
arrière-garde, le général Jacob
mais malheureusement ce général fut contraint de venir me retrouver,
après avoir reçu une balle à la cuisse droite.
» Je n'en exécutai pas moins ma retraite sur le Doré, où je suis
arrivé à huit heures du soir. Je n'ai encore eu jusqu'ici aucune nouvelle ni du
bataillon de la Marne, ni du 74ème régiment que j'avais envoyé à son secours,
non plus que de Flavigny et de sa troupe (1),
Les hurlemens affreux de l'ennemi ont porté l'épouvante dans l'âme des soldats
, et je crains bien que beaucoup d'entre eux né soient tombés sous les coups de
ces scélérats qui avaient un avantage inappréciable, celui de connaître
parfaitement le terrain.
» Je présume que le bataillon de la Marne et le 74ème régiment ont fait
leur retraite sur Montrevault.
Quant à Flavigni, il ne peut que s'être trompé de route, à cause de la
nuit, et je compte qu'il me rejoindra demain à la pointe du jour.
» Tu vois, mon cher camarade , que malgré la fatigue et un combat très-vif, je n’ai pas moins exécuté ton ordre de me rendre au Doré ; quant à Crouzat que j'y ai trouvé aussi la force des circonstances ne lui a point permis de se rendre au Fief-Sauvin.
» Je juge l'ennemi au nombre d'environ 3 000 hommes dont moitié armés
de fusils, et le reste de piques ou de bâtons. Il serait de la plus grande
importance de réunir une
partie de tes forces de ce côté-ci, afin de détruire ce repaire de brigands.
» Ma colonne, ainsi que celle de Crouzat, ont presque épuisé
toutes leurs munitions ; je vais en faire la demande à Nantes et à St-Florent
à la fois, et si.demain je suis attaqué par une force supérieure, je te
préviens que je me rapprocherai le plus possible de la Loire, même de Nantes,
où je compte faire ma retraite en cas de nécessité. »
(1)
Tout cela avait bien l'air d'une déroute ; mais Turreau ne conviendra pas même
de cet échec.
Le même jour à Montrevault
RJS : “Je me suis déterminé à faire partir ma troupe à trois heures du matin
pour Montrevault où je suis arrivée la pointe du jour. J'y ai trouvé le
74ème ; quant au bataillon de la Marne je ne sais encore ce qu'il est devenu,
non plus que mon adjudant-général qui a sous ses ordres près de 1 200 hommes.
J'attends Flavigny et mon bataillon de la Marne, pour être tranquille.
J'oubliais de te dire que la voiture de mon état-major, chargée de mes effets
et papiers , ainsi que de l'argenterie qui m'avait été déposée, est tombée au
pouvoir des brigands ; ce qui me console, c'est qu'ils n'ont pas ma
correspondance que j'ai toujours soin de faire porter par mon domestique. »
Le 2 février, le représentant Carrier, à Nantes, au général
en chef.
RJS : “Je te préviens, général, qu'une brigade de la division du général
Cordellicr, sous les ordres d'un adjudant-général, nommé Flavigny, a
trouvé dans sa route un rassemblement de brigands ; qu'à la première vue de ces
scélérats notre brigade s'est mise en déroute, sans brûler une amorce, s'est
repliée jusqu'à Nantes, et voulait absolument y entrer hier soir.
L'entrée lui a été refusée, et Vimeux lui a donné l'ordre de se rendre
ce soir au Lorouz. L'adjudant-général se plaint des soldats, ceux-ci se
plaignent de l'adjurant-général.,Trop malade pour prendre connaissance de cette
déroute vraiment inconcevable, je t'en laisse le soin.
Punis, punis, je t'y invite les traîtres et les lâches !!!
Il est étonnant, il est humiliant que des républicains aient lâchement fui
devant un rassemblement de brigands sans artillerie et dont la plupart
n'avaient point
de fusils. Justice, justice sévère...!
Le 2 février, Vimeux, de Nantes.
RJS : “Cette nuit à une heure, j'ai été prévenu qu'une colonne se présentait à
la barrière St-Jacques arrivant de Valet et demandait à entrer dans lé
ville.
Je l'ai laissée hors de cette barrière jusqu'au jour. J'ai fait venir chez moi
l'officier qui la commandait ; il m'a dit se nommer Flavigny,
adjudant-général de la colonne Cordellier.
Voici à peu près ce que j'ai pu tirer de lui : “Hier, m'a-t-il dit, nous nous
rendions au Doré ; nous avons été attaqués près de Geste par des
forces très-supérieures. Je n'avais pas de guide, j'ai trouvé une grande route,
je l'ai suivie et je suis arrivé devant Nantes. “
» D'après la note qui m'a été fournie par le commissaire ordonnateur sur
l'article des subsistances j'ai ordonné à Flavigny de conduire sa troupe
au Leroux et d'y attendre de nouveaux ordres. »
Le 4 février, Cordellier. à
Montrevault.
RJS : “Par la lettre que je t'ai écrite pour te rendre compte des affaires de la journée du premier de ce mois, tu as dû t'apercevoir que j'ai eu assez de délicatesse pour ne compromettre personne, malgré que quelqu'un l'ait véritablement mérité; mais aujourd'hui que toutes mes troupes sont rassemblées, aujourd'hui que j'ai éclairci ce qui ne m'avait encore paru que ténébreux, aujourd'hui enfin que j'ai appris à connaître les véritables qualités des personnes qui m'entourent, mon républicanisme m'impose le devoir de te dénoncer l'adjudant-général Flavigny, pour n'avoir pas, ponctuellement exécuté l'ordre que je lui avais donné, et qui, par cette faute impardonnable, a compromis la chose publique et fait perdre à la patrie beaucoup de ses zélés défenseurs.
» J'avais ordonné à Flavigny de ne point passer dans le bourg de Geste, mais de le laisser sur sa gauche en se dirigeant sur le Doré où tu m'avais ordonné de me rendre.
Ce n'est qu^après lui avoir répété plusieurs fois la marche qu'il
devait tenir, que je le fis partir avec des guides du pays auxquels
j’expliquerai aussi mes intentions.
Loin d'exécuter mes volontés, Flavigny continua toujours de faire à sa
tête et parvint à s'engager dans une affaire qui ne pouvait manquer de devenir
funeste.
» Indépendamment de cette faute, Flavigny en commit une seconde, en se portant jusqu'aux portes de Nantes, au lieu de se rendre au Doré, ainsi que je lui en avais donné l'ordre.
» Si Flavigny, en arrivant hier soir, n'eût pas nié formellement les ordres verbaux que je lui ai donnés, et s'il n'eût pas cherché par-là à me compromettre, j'aurais passé sous silence sa désobéissance ; mais, comme il a eu l'impudence de les nier, et que ma responsabilité serait compromise, si je cachais plus long-temps la vérité, je t'informe qu'une pareille conduite m'a déterminé à lui ordonner de se rendre dans les prisons de St-Florent.
Malgré que la faute qu'il a commise soit impardonnable, surtout pour un
ancien militaire, je compte ne l'en punir que par la voie de la discipline
seulement, à moins que tu
n'en ordonnes autrement (1). »
(i) Il
serait difficile d'ajouter foi à cette nouvelle version de Cordellier,
lorsqu'on se rappelle qu'il avait donné l'ordre à Crouzat d’attaquer l'ennemi à
Gesté, et que son intention était de soutenir cette
attaque... Le supérieur ne veut jamais avoir tort.
Le 5 février, Cordellier est à Gesté
et massacre 300 habitants.
Le 6 février, le général Moulin, au
général en chef Turreau à Cholet.
RJS : “Je viens de recevoir ta lettre qui m'annonce que tu n'es pas sans inquiétude sur le compte des généraux Cordellier et Crouzat. Je t'avoue que j'en suis très-inquiet aussi ; car enfin non-seulement ils ne paraissent point au poste de Tiffauge, mais encore je ne puis, par aucune patrouille ni découverte, apprendre où ils sont retirés.
» Le détachement de 500 hommes que, tu m'as ordonné de placer a Tiffauge
ne peut y tenir. Les brigands entourent ce poste journellement. Tu connais
l'esprit du soldat
sur la manière dont les brigands nous cernent; tous tremblent, et je crains
qu'à la plus petite attaque, ce poste ne nous soit enlevé avec beaucoup de
perte.
» Le commandant de Mortagne m'annonce que les brigands sont en force de l'autre côté du Longeron, ils viennent tous les jours l'insulter. Je ne puis renforcer ce poste pour le mettre à l'abri de toute attaque. Boucret avec sa brigade est à découvert à Chambretaud ; si tu voulais lui donner l'ordre de se rendre à Mortagne, nous pourrions nous secourir l'un l'autre.
» Il ne faut pas se le dissimuler, les brigands sont plus forts qu'on
ne se le persuade. Ils occupent La SalIe-de-Vihiers, les Gardes, Chemillé,
Vezins, Jallais, Tout-le-Monde, etc.
Le poste de Coron a été obligé de se replier sur Vihiers. Tu vois
qu'ils sont autour de moi sur tous les points.
» La position de Cholet étant difficile, la moitié de ma troupe bivouaque toutes les nuits, et l'autre est habillée et prête à marcher, mais le soldat se fatigue (1).
» Depuis que je suis à Cholet, je n'ai cessé de demander des cartouches à Saumur, je n'en reçois point et la moitié de ma garnison n'en a que sept à huit.
Je suis vraiment inquiet de Cordellier. Une fusillade assez vigoureuse s'est fait entendre ce soir du côté de Geste. Je désire que ma lettre te parvienne. »
(1) La
garnison de Chollet était alors composée de 23 détachements de différents
corps, formant environ 3 000 hommes, parmi lesquels il ne se trouvait que 1 200
hommes de troupes de ligne.
Le 6 février, le général Cordellier, au
général en chef, à Tiffauges
RJS : “En arrivant à Tiffauges, je m'empresse de te rendre compte de ce qui s'est passé dans ma division depuis le 1er de ce mois.
» J'attendais toujours ta réponse à ma dernière, avant de commencer mon mouvement; mais ton silence, joint au peu de renseignemens que j'avais sur la position actuelle de l'ennemi, m'a déterminé à partir de Montrevault pour me rendre â Tiffauges, en passant par Geste et Montfaucon où j'ai couché.
» J'ai ponctuellement exécuté ton ordre de purger, par le fer et le feu, tous les endroits que j'ai rencontrés sur ma route ; car indépendamment que tout brûle encore, j'ai fait passer derrière la haie environ 600 particuliers des deux sexes.
» Je n'ai point été inquiété dans ma marche d'aujourd'hui, mais hier, à environ une demie-lieue de Montfaucon où je ne suis arrivé qu'à minuit, quelques brigands voulurent s'opposer au passage de mon avant-garde. Quelques coups de fusil les mirent à la raison et ils nous échappèrent à la faveur de la nuit.
» En arrivant ici, j'y ai trouvé 600 hommes faisant partie des troupes
aux ordres du général Crouzat.
Ils formaient toute ma sollicitude; ainsi, maintenant toute ma division se
trouve rassemblée et portée à environ 2 400 hommes non compris 600 hommes qui
m'arrivent ce soir et que j'ai tirés de la garnison de St-Florent.
» Je viens d'écrire à Moulin pour le prier, de me donner les
renseignemens qu'il peut avoir sur la position de l'ennemi.
Je te prie également de me faire connaître ceux que tu peux avojr de ton côté.
»
Le mercredi 5
février le général Cordellier et
sa troupe reconstituée, quitta Montrevault,
après avoir laissé 41 morts, pour rejoindre à Tiffauges le général en chef Turreau.
Sa colonne infernale pris la route de Gesté
où ils arrivèrent à l’improviste dans le bourg. Là, ils firent main basse sur
les malheureux habitants qui avaient crus pouvoir entrer dans leurs demeures
incendiées, 4 jours avant, pour commencer à en réparer les dégâts. Ces
infortunées victimes, jointes à celles prises dans les fermes le long de la
route de Montrevault, formaient un
total de plus de trois cents.
La division conduite par Cordellier
se chargea d’emmener avec elle les prisonniers qui, n’ignorant pas le sort qui
les attendait, marchaient en silence égrenant leur chapelet. Un témoin
oculaire, une domestique de l’Ecorcheloire
occupée à laver du linge dans le ruisseau entre le bourg et le Petit-Moulin, put nous raconter la
suite. Elle vit qu’en deçà du Petit-Moulin une pauvre femme ne pouvant suivre fut
assommée ainsi que l’enfant qu’elle portait dans ses bras. Les deux
cadavres furent jetés dans un pré voisin. Il s’agissait de Renée Godin demeurant au bourg, agée alors de 28 ans, fille de Pierre Godin journalier et de Marie Rousselot, épouse de Jean Ravejeau, journalier. Sa fille Perrine Ravejeau massacrée avec elle n’était agée que de cinq ans.
Lorsque la colonne fut rendue au Plessis, les victimes furent placées
dans l’allée de la Bourie où les bourreaux après avoir mis le feu au château du Plessis et à ses dépendances les fusillèrent à la lueur
de l’incendie.
Louis Monnier, chef de la division de Montfaucon, nous raconte Gesté
après le passage de Cordellier, du 5 février 1794 :
« je devais ramener
promptement les hommes qu’il me fallait pour attaquer Beaupréau où étaient
5 000 hommes qui n’avaient pas osé nous attaquer.
Je pris donc deux cavaliers qui connaissaient la route. Il fallait passer
le bourg de Gesté qui était en
feu. Il faisait noir ; nous nous arrêtâmes un instant à l’entrée
du bourg pour voir s’il n’était point resté de bleus (les républicains).
Comment passer ? Les maisons en feu
tombaient dans les rues. Heureusement que nos chevaux n’étaient pas peureux.
Nous passions sur ces chevrons qui brûlaient. Nous voyions dans les portes des
femmes égorgées que le feu brûlait et des enfants massacrés que l’on avait
jetés dans les rues. Tel fut le spectacle que nous eûmes en traversant
le bourg à dix heures du soir. Ce qui m’effraya le plus, fut une maison
qui était tout en feu. Nous aperçûmes dans les chambres du bas une
quantité de victimes qui brûlaient, et dont l’odeur,
qui sortait par les croisées, nous infectait. A peine étions-nous passés de
quinze pas, que la maison s’écroula. La charpente tomba dans la rue, ce qui fit
un feu épouvantable. »
Le 5 février, Cordellier
passa à St Germain sur Moine, où
furent massacrées au moins 13
personnes.
Le 6 février, Cordellier était à Tiffauges, d'où iI écrivait au général
Turreau, commandant en chef les douze colonnes infernales, un rapport dont
voici un extrait :
"-Je me suis déterminé à partir de Montrevault pour Tiffauges, en passant par
Geste et Montfaucon où j'ai couché ; j'ai ponctuellement exécuté ton
ordre de purger par le fer et le feu les endroits que j'ai rencontrés sur ma route, car
indépendamment que tout brûle encore, j'ai fait passer derrière la haie environ 600
particuliers des deux sexes. "
Le 19 avril 1824, René Piou, mari de Louise Barré, déclarait devant le juge de
paix en vue de l'attribution d'une pension que : "la dite Louise Barre, étant agée de 4 ans, reçut plusieurs coups de sabre, tant sur la tête que
sur d'autres parties du corps,
dans un massacre qui eut lieu à Gesté, le 5 février 1794 ; que par suite
de ces blessures elle se trouve infirme et sujette à de grandes
incommodités..."
Le même jour, Joseph Guérin, 48 ans, maréchal à Gesté, attesta que : "dans
un massacre qui eut lieu à Gesté, le 5 février 1794, où périrent quatre à cinq cents femmes, enfants et
vieillards, la dite Louise Barre fut laissée pour morte,
couverte de blessures et baignée dans son sang et celui de sa famille ;
qu'ayant été secourue, on est parvenu , presque contre toute espérance, à lui
sauver la vie, mais qu'elle est encore infirme du doigt annulaire gauche,
affaiblie de la main droite et qu'elle a depuis ce massacre la respiration
râleuse et gênée."
Trois autres témoins
attestent des mêmes faits.
Le 8 février, Cordellier à Tiffauge
RJS : “Je ne sais, citoyen général, si Moulin t'a informé qu'il avait été trompé dans son attente, et que sa troupe était restée hier en position depuis quatre heures du matin, sans que l'ennemi ait osé venir se mesurer avec elle, malgré qu'il ne fût distant de Cholet que d'une lieue sur la route de Vezin.
De mon côté, j'ai été inquiété hier par environ 200 brigands ; j'ai envoyé contre eux un bataillon d'infanterie et 20 chasseurs qui en ont tué une partie et fait fuir l'autre jusqu'à Bazoges.
» Ce bataillon s'est fort bien acquitté de sa mission ; il a incendié le bourg des Landes Genusson et ses dépendances,
sans oublier le château , et a fusillé tous
les hommes, femmes et enfants qui y étaient restés.
» Comme je n'ai point de nouvelles du général Duquesnoy, que je soupçonne être du côté de Maulevrier, et que je suis certain de trouver l'ennemi sur la route de Cholet â Vezin, je pars à l'instant à sa rencontre, afin de le forcer au combat et de ne le plus quitter que quand il sera totalement détruit.
» Je ferai bivouaquer ma troupe de l'autre côté de Cholet aujourd'hui, pour en partir demain à la pointe du jour.
» Je laisse ici, pour la garde du château, deux bataillons, forts de
600 hommes, que j'ai tirés de la garnison de St-Florent. »
Vers le 13 février 1794, Cordellier se rend à Saint Crespin et y massacre « dans le Champ de la Vigne »
les domestiques de Boisame, la
mère du général Monnier et
emmènent sa femme à Clisson avec beaucoup d'autres personnes qu'il saisit
chemin faisant ; rendu dans cette ville, il fusille prisonniers et prisonnières.
En passant à Tillières, il massacre la famille Brin, de l’Etardière, 6 enfants de 11 à 3 ans, et 3
adultes.
Les colonnes y
repasseront encore 3 fois les 22 mars,
5 avril et 8 juin de cette année 1794.(voir ici la liste
complète des 59 morts de
cette période)
Le 22 Mars 1794
, fut massacrée toute la famille CHAUVEAU, âgées de 60 à 3 ans à Foye à St Germain sur Moine.
-
En Juin 1794
,furent massacrées aussi 8 personnes de la famille MARY, âgées de 40 à 4 ans à St Germain sur Moine.
-
le lendemain, Cordellier écrivit à Turreau :
“J’ai
ponctuellement exécuté ton ordre de purger par le fer et le feu les endroits que
j’ai rencontrés sur ma route, car indépendamment que tout brûle encore, j’ai fait passer
derrière la haie, environ 600 particuliers des deux sexes. »
le 7 février, la colonne infernale de Cordellier passe le pont de
Chambrette aux Landes-Genusson, et tombe sur 200 vendéens qui leur tirent
dessus avant de prendre la fuite. Le lendemain, Cordellier fait son
rapport à Turreau :
" ...
De mon côté j'ai été inquiété hier par deux cents brigands ; j'ai envoyé contre
eux un bataillon d'infanterie et vingt chasseurs qui en ont tué une partie et
fait fuir l'autre jusqu'à Bazoges.
Ce
bataillon s'est fort bien acquitté de sa mission ; il a incendié le bourg des Landes Génusson
et ses dépendances, sans oublier le
château, et a fusillé tous les hommes, femmes et
enfans qui y
étaient restés..." (Savary, t. III, p. 165).
Cordellier va donc ramasser une centaine
d'habitants, essentiellement des femmes et des enfants, dans le bourg et les
pousser à coup de crosse jusqu'à l'entrée d'un champ le long de ce qui était à
l'époque la route de Tiffauges.
Douze personnes parviendront à s'échapper, les quatre-vingt-huit autres seront
massacrées.
Le bourg des Landes-Génusson sera bien entendu incendié comme on l'a vu avec le rapport de
Cordellier.
Entre le 11 et le 14 février 1794, la Colonne Infernale de Cordellier est dans le secteur de la Chaussaire, où il fait au moins 30 victimes (voir ici le détail).
Le 14 février, Cordellier à
Beaupreau, pour le général Huché, à Cholet.
RJS : “Je n'ai point rencontré
l'ennemi qui est suivant toutes les apparences à Neuvy et à Ste-Christine.
J'ai fait incendier Chemille en le quittant.”
Le 14 février, Turreau, à Nantes
écrit au Ministre
RJS : “C'est un vrai plaisir pour moi de t'annoncer les nouveaux succès qu'ont
obtenus les armes de la république.
Le général de division Cordellier m'annonce deux victoires remportées
aux environs de Beaupreau et de Montrevault,
1 500 brigands ont mordu la poussière, 200 se
sont noyés dans l'Êvre.
Cordellier les poursuit sans cesse, c'est mon ordre ; les deux colonnes
agissantes devant poursuivre sans cesse les rassemblement de l'ennemi, tandis
que des postes d'observation le tiennent en échec et l'empêchent de sortir d'un
cercle que chaque victoire rétrécit de plus en plus (1).
(1 Les
deux colonnes n'en formaient qu'une, celle de Cordellier réunie à celle de
Crouzat. Il n'existait plus, dans l'intérieur de la haute Vendée, que le poste
de Cholet. Le cercle étroit était toute la
Vendée.
La 5ème demi-colonne de Crouzat, adjoint de
Cordellier.
Elle ira de Brîssac à Thouarcé, Gonnord ,
Chemillé, Le May, la Romagne, St Philbert, Montfaucon.
Le 23 janvier,
Crouzat arrive à Gonnord. L’armée entoure le village ; les soldats surprennent
200 de ses habitants, dont
une trentaine d’enfants, les conduisent à l'extrémité du bourg, sur la route de
La Salle-de-Vihiers, et les massacrent
sur place, avant de reprendre
leur marche sur Joué-Etiau.
Le 23 janvier, à Gonnord, il
surprend 200 personnes, femmes,
enfants, vieillards et les massacre
sans pitié, en enterrant même quelques uns vivant !
Sur le chemin de Joué, il stoppe une horde
de paysans tentant de s'échapper, il les massacre également, brûlant
le bourg parla même occasion.
Partout où il passe, à Chemillé, Chanzeaux, Melay, c'est le même rituel qui se
passe avec un plaisir immonde à l'exécuter.-
le 24 janvier.
Lors du passage de la 5ème colonne infernale de Crouzat à la Sorinière
de Chemillé, la ferme est pillée
puis livrée aux flammes. Les
fermiers et leurs familles sont massacrés.
À leur arrivée, les
soldats républicains massacrent
François Rochard, âgé de 69 ans,
et ses deux belles-filles : Jeanne
Dailleux et sa sœur Marie. Les
deux maris, Jean et René Rochard, sont absents. Depuis le début de la guerre,
ils combattent auprès de l'Armée vendéenne. René a été réquisitionné pour
transporter le ravitaillement aux troupes. Jean a dû rejoindre l'armée de
Stofflet.
La folie meurtrière de la colonne infernale de Crouzat n'épargne pas non plus les cinq jeunes enfants nés de l'union de René et Marie : Henriette, âgée
de 5 ans et demi, René, 4 ans, et Joseph, 5 mois et ceux nés du mariage de Jean
et Jeanne : Jeanne, 4 ans et Pierre, 2 ans.
Jean Rochard et Jeanne Dailleux avaient aussi donné naissance à des jumeaux en
1788. Jean-Louis a été grièvement blessé à la tête et laissé pour mort mais a
survécu 82 ans. François-Jean a traversé cette épisode sanglant et a vécu 87
ans.
Le 24 janvier, toutes les femmes du bourg de Melay et des
villages répondent à l'injonction qui leur a été faite de comparaître devant ce
Comité des Gardes pour y recevoir un brevet de civisme.
Une fois les femmes réunies dans la salle d'audience, le président veut savoir
celles dont les maris ou enfants auraient été dans l'armée des brigands.
Saisies d'épouvante, elles répondent néanmoins avec franchise, préférant mourir
que de trahir leur conscience par un mensonge.
Le lendemain 25 janvier, la paroisse
est enveloppée par un détachement de la colonne infernale commandée par Crouzat. Une compagnie d'infanterie
arrive. Les soldats envahissent les maisons. Ils en tirent brutalement leurs
habitants et les conduisent dans la cour du presbytère, dont la salle est
transformée en tribunal révolutionnaire. Le jugement est vite mené. Toutes
celles dont le mari ou un proche ont combattu sont condamnées à mort avec leurs
enfants. Avant de procéder à l'inique sentence, on met le feu aux maisons des victimes
puis à la cure et à l'église.
Les victimes marchent entre une double haie de soldats, traversent le pré de la
cure et arrive près du fossé du champ désigné pour l'exécution.
Les victimes sont poussées avec brutalité dans la haie d'épines. Un roulement
de tambour se fait entendre.
L'officier commande le feu. Les soldats achèvent les
blessés.
52 personnes dont 23 enfants sont massacrés dans ce champ.
Le 25 janvier, Cordellier
écrit :
RJS : ”Mon adjoint Crouzat, hier (en fait il s’agit du 23) au seul bourg de Gonnord, a tué 310 brigands, vieillards, femmes et enfants, mis
vivants dans le fossé.
Dans ce moment 40 métairies éclairent la
campagne. “
Le 25 janvier, Crouzat arrive à Chanzeaux
et trouve dans l’église mesdemoiselles
Picherit et Blanchard en train de fleurir l’autel. Les soldats les
arrêtent, ainsi qu’un vieillard et une douzaine d’autres femmes du village. Tous sont
fusillés.
Le 26 janvier, Crouzat écrit depuis
le May
RJS : “J'ai cru devoir, citoyen général, exécuter
ton ordre de cette nuit. J'ai suivi la route que tu m'avais indiquée et sur mon
passage, depuis Cbemillé jusqu'à Jallais où je suis arrivé à une
heure, j'ai fait fouiller villages, bois, landes, genêts, sans rencontrer de
brigands. J'ai vu à Jallais, le général ***, à qui j'ai fait mon
rapport.
» Je suis établi ici
militairement et dans la plus grande surveillance, en attendant tes ordres. Je
n'ai pas manqué de faire désarmer tous les bourgs et villages par où j'ai
passé. »
» Comme j'achevais ma
lettre , je reçois un billet de ton premier secrétaire Courtin qui me prévient
que tu as envoyé 600 hommes d'infanterie et 50 chevaux pour reprendre Chemillé.
»
Le 27 janvier, il est toujours au May
RJS : “Je dois te rendre compte, citoyen général,
de la pénurie dans laquelle je me trouve pour procurer du pain à ma troupe.
J'ai eu toutes les peines du monde, au moyen d'une réquisition k la
municipalité, à faire fournir lff*ubsistance pour aujourd'huî.
Tu as dû apprendre que nos vivres ont été pillés à Chemillé. Je te prie de
donner tes ordres en conséquence.
» Il n'y a rien de nouveau dans nos environs, je les fais fouiller par des
patrouilles qui ne sont pas encore rentrées. »
Le 28 janvier, toujours au May
RJS : “Je m'empresse de l'envoyer, citoyen général,
le rapport de deux émissaires que j’ai mis en campagne, aujourd'hui, l'un sur
la Romagne et l'autre sur Trementines, pour découvrir la trace de
l'ennemi. En conséquence, j'ai fait doubler les postes; toute ma troupe est sur
le plus grand qui vive.
“Permets-moi une
observation : tu peux bien être assuré
que moi et ma troupe nous sommes disposés à opposer à l'ennemi la plus
vigoureuse résistance, mais, comme il faut tout prévoir, permets-moi de te
demander sur quel point je devrais faire ma retraite, si, ce que je ne prévois
pas, j'y étais forcé par des forces supérieures. Serait-ce sur Chollet ?
serait-ce sur Jallais ? J'attends ta réponse. »
Le 29 janvier, toujours au May
RJS : “Ma troupe à été sous les armes depuis six
heures du malin jusqu'à la nuit. Je lui ai fait prendre position à
l'embranchement du chemin de Jallais et de Çhemillé. J'étais avec
elle pendant que l'adjudant-général Levasseur gardait le bourg du May
avec 300 hommes : tout a été tranquille.
» J'avais donné l'ordre
au détachement de 100 hommes, envoyé à St-Macaire, de rentrer ;
l'ordonnance est arrivée au moment où le poste a été attaqué par une troupe de brigands
dont le nombre paraît être de 800 à 1000 hommes.
Le détachement a été mis en déroute à mon très-grand regret, et s'est sauvé de
côté et d'autre. Il y en a plus de 60 de rentrés, et j'espère qu'il en rentrera
encore ; il en arrive à chaque instant."
Le 30 janvier, toujours au May
RJS : “Je
vois avec beaucoup àe chagrin, citoyen général, que tu as désapprouvé le
détachement de cent hommes que j'avais envoyé à St-Macaire, à la demande
cette commune, dans laquelle la république avait des magasins de grains a
conserver. Au départ de ce détachement, une ordonnance est partie pour t'en
rendre compte. Je serais bien fâché d'entreprendre rien contre les ordres et
les dispositions de mes chefs.
Le désir de concourir à la conservation des magasins dont j'avais eu avis, m'a
décidé à faire partir le détachement qui, à la vérité, à éprouvé un échec qui
me fait beaucoup de peine mais aussi les
brigands n'ont fait que passer dans St-Macaire, et les magasins ont été
conservés. Quoi qu'il en soit, je t'envoie fidèlement le rapport qui vient de
m'étre remis par le chef de bataillon qui commandait le détachement. »
Extrait du rapport du chef de bataillon Dreulhe./
RJS : “Chargé par le général Crouzat de me
rendre à St-Macaire avec 100 hommes de mon bataillon, à l'effet de
protéger les grains et les fourrages qui s'y trouvaient en très-grande
quantité, j'y suis arrivé le 28 à trois heures après midi, et je me suis
bientôt aperçu que je me trouvais parmi des amis de la république.
» Ce matin 29, sur le
bruit répandu que des brigands rôdaient dans les environs de St-Macaire,
j'ai cru qu'il était de mon devoir d'aller à la découverte avec une partie de
- mon détachement, l'autre restant employée au service de la place. Environ une
heure après ma sortie, j'ai entendu le bruit de la mousqueteric vers St-Macaire,
je m'y suis rendu de suite. A peu de distance du village, j'ai rencontré les
brigands réfugiés dans un bois ; j'ai remarqué qu'ils étaient en assez grand
nombre, dont 20 cavaliers, et que beaucoup de femmes se trouvaient parmi eux.
Ils ont fait feu sur ma patrouille; j'ai fait riposter , et j'ai effectué ma
retraite sur St-Macaire où je croyais trouver les hommes au poste que
j'avais établi. J'ai appris que ces hommes avaient été attaqués par 600
brigands, mais qu'ils s'étaient battus, quoiqu'en petit nombre, d'une manière
distinguée ; que. cependant ils avaient été obligés de faire retraite sur le
bourg du May. J'ai aperçu cinq hommes de mon détachement tués et trois
blessés. Je me suis déterminé alors à faire ma retraite sur le May, où
je suis arrivé en bon ordre. •
Le 31 janvier Cordellier
déclare
Je viens de donner l'ordre
à Crouzat, qui se trouvait à St-Philbert, plus près de Geste
que moi, de s'y porter et d'attaquer sur deux colonnes.
Crouzat
se rendra au Fief-Sauvin ainsi que le porte ton ordre. ».
Le 1er février, le Général Moulin, depuis Cholet,
sur la défaite de Robiquet à Gesté
RJS : “Je te
donne avis que la colonne de gauche du général Crouzat, aux ordres du
chef de brigade Robiquet, a été attaquée et forcée à la retraite à Geste.
Il parait qu'il a fait sa retraite sur St-Philbert où il n'a point
rencontré le général Crouzat. Il a protégé la retraite d'un convoi qui
le suivait, et une grande partie de sa troupe vient de rentrer en désordre à Cholet
: lui-même est blessé d'une balle à l'épaule,
Il a perdu trois ou quatre officiers et une centaine de fusiliers. Il paraît
qu'il a vu de très-près le chef vendéen revêtu de l'habit de général de
brigade, et toute sa suite en habits bleus. Tu feras bien d'en prévenir tes
postes avancés, afín qu'ils ne se laissent pas tromper par ce déguisement.
“Demain, j'expédie
sur Saumur toutes les femmes, filles, enfants et vieillards réfugiés ici. Je ne garde que ceux qui sont en état de
travailler aux abattis. Les subsistances sont trop difficiles à fournir
(1), . s \
(1) En
détruisant les fours, les moulins, les moyens de transport il ne restait plus
de ressources aux troupes pour vivre, et l’on était obligé de faire venir du
pain de Saumur et de Nantes dans l'intérieur
do la Vendée.
Le 1er février 1794, une partie des troupes
de Crouzat. chassée de Gesté par l'armée vendéenne cantonne à St
Philbert.
4 femmes et 6 enfants dont l'aîné a
moins de 9 ans sont massacrés au
lieu-dit « les Cimbronières » sur la route d’Andrezé.
Le 1er février, à Gesté, vers 8 h du
matin, les Bleus arrivent par la route de Villedieu.
C’était Crouzat ayant couché à St-Philbert. Le combat commença au Petit-Moulin et se continua avec
acharnement jusqu’au bourg. Les vendéens accablés par le nombre pliaient et
déjà quelques-uns avaient pris la fuite dans la direction des landes de la
Musse. Les républicains, au lieu de les poursuivre sans trêve, s’attardèrent
dans le bourg à massacrer les infirmes, femmes,
enfants et vieillard à qui pourtant ils venaient de
promettre la vie sauve pourvu qu’ils restent dans leur maison. Quelques heures
plus tard, ils repasssèrent à Gesté et incendièrent le bourg à l’exception de quelques
maisons qu’ils connaissaient. Seules six maisons restèrent debout.
La nuit du 5 au 6
février 1794 : la colonne de Crouzat perpetra l’effroyable
massacre de Montfaucon.
La ville est incendiée. Les assaillants laissent en se retirant un
monceau de cadavres sur une place publique. On dénombre 41 morts dont 26 adultes, 3 adolescents et 12 tout petits enfants,
et parmi eux les deux filles Rousseau,
Victoire et Rose qui survivront bien que très mutilées ; l'une avait à la gorge une horrible blessure, par laquelle sortait tout ce qu'on voulait lui
faire avaler. L'autre avait un
poignet tranché. Soignées par un
chirurgien de la ville, ces deux enfants guérirent. Victoire qui avait
eu la main tranchée d'un coup de sabre a vécut jusqu’en 1863 à Montfaucon,
où on l'appelle, à cause de cela, la Mancotte. Le bleu qui lui coupa la main se justifia en disant que ça lui ferait un “souvenir de
la Vendée”.
Le massacre étant terminé, les Bleus pillent de nouveau, puis après avoir
incendié les maisons, ils s'éloignent
de Montfaucon en emmenant toute la population de Pont-de-Moine, qu'ils égorgent à une demi-lieue de là, dans un endroit nommé les Tierreaux
(Quereaux).
**************
La 6ème colonne de Moulin.
Forte de 650 hommes cette
colonne ne s’est pas dédoublée.
Parti des Ponts-de-Cé, il
incendie Mozé-sur-Louet, St-Laurent-de-la-Plaine et Ste-Christine mais
épargne Rochefort-sur-Loire et St-Aubin-de-Luigné.
Le 24 janvier, la colonne part des Ponts-de-Cé
et incendie Mozé-sur-Louet mais épargne Rochefort-sur-Loire.
»RJS : (Moulin) est arrivé aujourd'hui à Rochefort et a dû t’informer de ce
qu'il a fait dans sa marche et de ce qu'il fera. Je sais seulement qu'il a
envoyé brûler
le bourg de Mozé. »
Le 25 janvier : Moulin est à Ste-Christine, qu'il ne détruit pas.
Le 27 janvier : sa colonne détruit St-Laurent-de-la-Plaine et retourne
incendier Ste-Christine.
Le 27 janvier, Moulin, depuis Ste Christine, déclare :
RJS : « Je n'ai pas voulu m'ensevelir au village
de Ste-Christine où je pourrais être
surpris. Je me suis établi au ci-devant château
du Planti qui a été brûlé ; mais il
reste encore quelques granges qui peuvent mettre à l'abri la moitié de mes
soldats, de façon que la moitié seulement est au bivouac. Au moins j'ai tout
mon monde sous la main.
Je vais demain, et en
attendant de nouveaux ordres de toi, brûler tout ce que je pourrai dans les environs ; quant
à St-Laurent, il n'y existe plus
une maison.
Il m'a été de toute
impossibilité de faire enlever les grains et les fourrages , car je ne
rencontre presque pas un homme dans les fermes.
Je viens de faire fusiller deux femmes dont une était comtesse, je ne me rappelle plus son nom.
J'apprends à l'instant, et
il est huit heures du soir, que les métayers de St-Quentin, requis pour
venir à Ste-Christine, ont refusé de
marcher, parce que LaRochejaquelein leur a fait dire qu'il tuera aujourd'hui
tous ceux qui auront marché pour la république.”
Le 28 janvier, de Ste Christine, Moulin manque de
moyens
RJS : » II m'a
été impossible d’incendier le» métairies des environs d'ici. Il n'y a presque plus
d’hommes pour conduire les voitures employées au transport des subsistances. Il
y a dans les communes environnantes du foin et autres fourrages pour nourrir
pendant six mois tous les chevaux de l'armée de l'ouest et si l'on ne prend pas
de grandes mesures, il faut deux mois pour enlever le tout. »
Le 28 janvier, à La Poitevinière, des femmes et des enfants sont découverts, cachés derrière
des taillis et massacrés, un petit enfant est promené au bout
d'une pique par un soldat de Moulin.
http://dona-rodrigue.eklablog.com/la-poiteviniere-et-les-guerres-de-vendee-a5009216
Le 29 janvier, Moulin
est à Cholet où Turreau lui donne l’ordre de se maintenir mais
le 8 février ses
hommes, bien que renforcés par ceux de Caffin, sont attaqués par les
soldats de Stofflet, au nombre de 5 000.
Le général Caffin est frappé à ses côtés
de deux balles; il se relève et combat encore.
Moulin est blessé aussi à la poitrine : sa chute devient le signal de la
déroute.
Ce général, couvert de sang, tente de s'opposer à la fuite de ses soldats; ses
soldats méprisent les ordres qu'il intime, les prières qu'il fait entendre.
Alors les tirailleurs que Stofllet a façonnés de longue main à tous les
périls s'égaillent dans cette ville enlevée à la baïonnette. D'autres
s'acharnent à la poursuite de Moulin, qui résiste avec un courageux
désespoir à l'entraînement de ses troupes. Vaincu et perdant tout son sang, il
voit son cheval s'abattre dans une rue encombrée de fourgons chargés de
mourants. La fuite est impossible. Il va tomber vivant entre les mains des
Royalistes, lui qui, comme ses collègues, a déployé contre la Vendée une
impitoyable rigueur; lui qui porte encore une de ces culottes de peau humaine dont Beysser est l'inventeur; lui qui écrivait à Courtin,
secrétaire du général Turreau, et qui l'invitait à « venir manger à sa table de bonnes aloses engraissées
avec des cadavres de Brigands. »
Pour s'arracher au supplice, il saisit un de ses pistolets et se brûle la
cervelle.
Il est enterré par les généraux Huché et Cordellier au pied d’un arbre de la liberté.
La 2ème demi-colonne de Grignon et Lachenay
Ces
deux colonnes partent de Bressuire et doivent arriver à La Flocellière et Pouzauges
le 21
janvier dans le bourg de St-Clémentin, une
trentaine d’habitants, dont sans doute une dizaine de femmes sont massacrés sur la place du village. Les soldats de Grignon jouent aux boules avec les têtes
décapitées … Une fosse aurait été
creusée près du presbytère, elle contiendrait les restes de 300 à 400
victimes massacrées à coups de sabre.
Le même jour à Voultegon,
proche de St-Clémentin, Grignon fait fusiller bon nombre d’habitants qu’il avait rassemblés devant la chapelle Notre-Dame de
Bonne Nouvelle.
Relatant la journée du 22 janvier. Auguste Chauvin, membre du comité
révolutionnaire de Bressuire dira :
« A
partir d’une lieue d’Argenton, dans l’extrémité de la paroisse de Chambroutet, sur le chemin de Bressuire, tout ce qui fut rencontré fut sacrifié à la rage de Grignon, et le massacre fut horrible ; à St-Aubin-du-Plain,
sous le prétexte ridicule que l’on avoit trouvé dans le clocher un drapeau de
brigands, qui n’était cependant qu’un devant d’autel, il fit massacrer toute la municipalité, qui s’était présentée au-devant
de l’armée, décorée de l’écharpe, ainsi que tous les bons citoyens de la
commune qui s’y étaient réunis pour faire le service de la garde nationale, en
vertu d’une lettre du district qui le leur prescivoit. Grignon satisfit sa rage par le massacre de
tous les individus (sans distinction) qu’il rencontra, et l’incendie de plusieurs maisons ; la continuation de sa
marche pour arriver à Bressuire, fut aussi la continuation des mêmes horreurs
: je dois observer que Grignon, dans
cette dévastation générale, qui eut lieu dans l’espace de deux lieues de pays, brûla une très grande
quantité de subsistances de toutes espèces. »
Grignon lui-même annonce dans
son rapport quotidien :
“J’ai fait bruler quantités
de métaieries,
surtout le bourg de St-Aubin-du-Plain,
où j’ai trouvé dans l’église un drapeau noir et blanc. Les hommes et les femmes
qui s’y sont trouvés ; tous ont passé au fil de
la baïonnette.”
Le 25 janvier, Grignon
rapporte :
“Je continue
toujours de faire enlever les subsistances et de brûler et de tuer tous ceux qui ont
porté les armes contre nous.
Cela
va bien; nous
en tuons plus de cent par jour... J'oubliais de te dire que l'on m'a arrêté une
dizaine de fanatiques... Ils iront au quartier général.
Ces
misérables font de l'esprit. Grignon comme son collègue Cordellier
emploient d'aimables métaphores pour annoncer l'exécution de leurs victimes.
Cela
s'appelle : « envoyer au quartier général »; « donner un billet d'hôpital «; «
faire passer derrière la haie... », etc.
Le 26 janvier, plus au sud, le Bressuirais est la victime des colonnes
de Grignon et de Lachenay. Déçus de ne pouvoir incendier
les bois trop humides, les Bleus désolent le pays d'Argenton à Cerizay.
Grignon en rend compte à Turreau :
“ Toutes les métairies, les bourgs et les villages que nous avons
rencontrés aujourd'hui comme hier, ont été passés aux
flammes. Ma colonne de gauche en fait autant. Nous en tuons près de 2 000 par jour.”
Le 30 janvier,
le général Grigon rejoint Lachenay
à Pouzauges où se déroule le fameux épisode du viol et du massacre des prisonnières du château. Il ne serait resté, dit-on, que sept maisons debout à Pouzauges après le passage des colonnes de Grignon
et Lachenay.
“Le 31 janvier 1794, Grignon part avec sa colonne, incendie
tous les villages depuis La Flocellière
jusqu 'aux Herbiers, dans une distance
de proche de trois lieues où rien n'est épargné, les hommes, les femmes, les enfants
même à la mamelle, les femmes enceintes, tout périt par les mains de sa colonne ; en vain, de malheureux patriotes, leurs
certificats de civisme en main demandèrent la vie à ces forcenés ; ils ne sont
pas écoutés ; on les égorge...” (d’après
témoignage de Lequinio)
Le 22 mars, Grignon ayant quitté Somloire,
repasse tuer et incendier à Etusson.
Le 31 janvier, alors qu'elle vient
d'épargner les habitants du Boupère,
la colonne infernale de Lachenay massacre 200 femmes, enfants et vieillards dans la cour du château et incendie celui-ci.
Ils opèrent une rafle
auprès des habitants de Rochetrejoux et de Mouchamps après avoir tué de pauvres paysans du Boupère la veille, paroisses pourtant réputées plutôt
républicaines.
Pierre Mérit, alors agé de 8 ans, témoigne :
“Nous
étions, mon frère et moi, à pêcher des verdons sur les bords du Lay, quand nous
fûmes saisis par des soldats. On nous mena au milieu d'une troupe de pauvres
gens de tout âge, marchant deux à deux, comme des moutons. Je reconnus beaucoup
de mes parents et de mes amis [...] Arrivé dans la cour du Parc (château du
Parc-Soubise), je vis des bleus mettre le feu au château. Pendant que le château brûlait, les soldats nous
placèrent sur deux rangs, et tirèrent sur tout le monde
à bout portant.
Ma cousine tomba près de moi et quand il ne resta plus que deux ou trois
enfants qui avaient été manqués, le chef cria : « C'est
assez
». Alors j'ai été sauvé.”
Par la suite, les propriétaires de ce
château ont désiré laisser l’endroit tel quel, en mémoire de la tragédie. Seule
la toiture a été refaite, afin de préserver les boiseries brûlées des affres du
temps.
Le 31 janvier, la colonne de Cordellier se rendant de Beaupreau
à la Chapelle-Aubry massacre
20 à 30 personnes ramassées entre
autres à la ferme voisine de la Ragonnière, à la « Croix de l’Aigrasseau » à la sortie des
bois du château de Barot.
le 2 février 1794, au
Guichonet puis aux Cimbronnières de St-Philbert-en-Mauges,des
soldats républicains de la colonne du chef de brigade Robiquet,
adjoint de Crouzat, en déroute après la bataille de Gesté, massacrèrent les habitants surpris chez eux, dont les familles Moreau
Brebion, Fonteneau. La moitié des victimes était des enfants.
Autres exactions
commises pendant cette période hors des Mauges mais sur des territoires assez proches
Massacres de Doué
Voir le détail de cette affaire
du 30 novembre 1793 au 22
janvier 1794, 1200 personnes sont emprisonnées, 350 à 370 sont exécutées et 184 meurent en prison de Doué-la-Fontaine,
Détenus, dans des conditions effroyables, dans les
souterrains du château, dans les caves de l’Amphithéâtre et de la Porte-Bonin, dans l’église Saint-Pierre
de Doué-la-Fontaine
- 184 prisonniers moururent de misère entre le 4 décembre 1793 et le 22 janvier 1794.
- 12 furent guillotinés sur l’actuelle place du Champ-de-Foire, les 6, 8, 9 et 10 décembre1793.
- 351 (ou 359) furent fusillés
dans les bois de l’abbaye d’Asnières,
Les corps des fusillés furent enterrés sur place comme le confirme Elie Trouillard, tonnelier à Doué, qui fut requis avec d’autres de se rendre « au bois de Brossay, à l’effet de faire des fosses ».
Après la fusillade, le fameux Jean Jacques Guillemette, commandant de la place de Doué, demanda aux requis de retourner les cadavres. Parmi ces derniers, il s’en trouva « qui n’avaient pas encore rendu le dernier soupir ». Alors Guillemette « ordonna aux grenadiers de la Convention de les achever, ce que ces derniers exécutèrent à coups de fusils et de sabres ».
Puis, ajoute Trouillard, on nous ordonna « de mettre
tous les cadavres dans les trous que nous avions faits, ce qui fut exécuté, et
nous les recouvrîmes de terre ».
Ce témoignage fixe le lieu de l’exécution et la localisation
approximative des fosses. Cette fusillade eut lieu le 7 décembre et
compta 68 victimes d’après les archives. Ce
qui est exactement le chiffre donné par Elie Trouillard dans sa déposition. Cette fusillade compta 35 habitants de la
paroisse de La Tourlandry.
Le même témoin déclare que Guillemette fit exécuter, sans
aucun ordre, une quinzaine de détenus à la Porte-Bonnin.
D’autres exécutions, précédées d’aucune forme de procès, eurent lieu à Doué sans que nous puissions donner leurs dates, leurs nombres, le nom des victimes...
Autres exactions
commises après le 8 février 1794, date officielle de fin des colonnes
Le 9 février alors que l’on destitue Carrier
à Nantes, on fusille deux cents personnes à
le 12 février du même mois, plus de quatre cents personnes sont tuées sans combattre près de Port-Saint-Père.
Le 14 février Turreau écrit au ministre de la guerre : « depuis que je suis entré en Vendée, voilà plus de douze mille
brigands qui sont exterminés. »
Et voici que la Vendée exsangue verra son malheur aggravé par l’ignoble
Huché..
Dès le 1er février, inquiet des incursion répétées
des bandes de Stofflet autour de Cholet, le général en chef Turreau.
décampe et va s'installer à Mortagne.
Le général Jean-Baptiste
Moulin le remplace à la tête des garnisons de Cholet, mais, quelques
jours plus tard, le 8 février, lors du combat de rues qui se livre dans Cholet,
grièvement blessé et sur le point d'être pris par les Vendéens,il
se brûle la cervelle.
Le 15 février, Turreau nomme Huché, en remplacement de Moulin.
“Huché est un boucher toujours ivre...” de l'aveu même de ses collègues scandalisés,
« Il a l'habitude de paraître
à la tète de la troupe, pris de vin et tenant des propos très inconvenants... »
Cynique et débauché,
il abuse des malheureuses prisonnières qu'on lui amène et va prendre avec elles, suivant
son expression. "le café de Cythère" avant de les livrer aux baïonnettes de ses soldats.
Le jour même ou il
arrive à Cholet, il fait fusiller
quelques malheureux prisonniers
et garde pour domestique le fils de l'un d'eux, un jeune garçon du nom de
Brosseau.
Boutillier de St
André brosse un portrait
édifiant de ce tueur, lorsqu'en partance pour Mortagne il logea chez
lui, dont cet extrait :
" Le général, qui était ivre et
qui, en venant de Cholet, était tombé deux fois de cheval, avait plusieurs
contusions à la figure... »
La grand mère de
Boutillier, qui le reçoit tout en crainte et tremblement, croit devoir
s'informer timidement de ce qui lui est arrivé :
" Vous êtes
blessé, général ?... Il faudrait vous faire tirer du sang..."
— Qu'appelez-vous
blessé ?... Qu'entendez-vous par tirer du sang ?
Apprenez que c'est moi
qui en tire aux autres... Je suis boucher... boucher de chair humaine !
»
Le 22 février 1794, le
Général Duquesnoy, écrit à Turreau, depuis St Fulgent,
« Je suis parti des Herbiers et ai fait égorger
dans les communes à portée de ma route plus de cent
hommes, non compris les femmes.
Je te préviens encore que nous avons égorgé aux
Herbiers un petit poste armé de piques et de fusils; d'après plusieurs
rapports, l'ennemi y est venu fourrager en force hier matin.
Je te rends compte qu'après avoir donné une escorte à mon ambulance,
partant de Mortagne pour les Herbiers, une voiture
s'est brisée en route. Le commandant de cette ambulance ne m'envoya
aucune ordonnance pour m'en faire part, et l'escorte quitta aussitôt
l'ambulance pour suivre tes deux premières voitures, de sorte que le conducteur, deux charretiers des voitures
embourbées et quelques traînards, tout a été égorgé
et pris par les rassemblemens qui s'étaient repliés sur la Gaubretière, la
Verrie, Beaurepa re et Bazoge.
Je te préviens de plus, citoyen général, que le poste que tu as à Mortagne,
si tu ne donnes d'autres ordres, sera égorgé au premier
jour, vu que l'ennemi occupe deux ou trois points qui l'avoisinent.
Le commandant de ce poste m'a même rendu compte que, dans une découverte qu'il
fit faire la veille ou l'avant-veille, il eut quatre
hommes égorgés, dont un officier.
J'attends tes ordres pour renvoyer les voitures d'ambulance, les chemins que je vais parcourir étant impraticables
pour elles »
Le 27 février, la colonne Huché visite tous les villages et les
hameaux de la Gaubretière, déjà
mises à mal par Boucret, un mois
plus tôt.
La vallée de la Crûme, petite rivière qui arrose la campagne
gaubretiéroise, devint le théâtre d'un affreux massacre qui lui valut le nom de
Vallée des Royards, en souvenir des hurlements de douleur des victimes.
Plus loin, un autre lieu de tuerie fut appelé le Champ des Oreilles, car
les
bourreaux y coupèrent les oreilles d'une cinquantaine de malheureux.
Près de l'ancien prieuré de Gros-Bois, une vingtaine de personnes furent
décapitées, tandis que plus de
trois cents autres, acculées à l'étang du Drillais, furent impitoyablement
exécutées dans ce qui deviendra
le Champ du Massacre.
Huché
écrit dans son rapport au général en chef Turreau
« Plus de
cinq cents [brigands], tant hommes que femmes, ont été tués. J'ai fait fureter les genêts, les fossés, les
haies et les bois, et c'est là qu'on les trouvait blottis. Tout a été
passé par le fer, car j'avais
défendu que, les trouvant ainsi, on consommât ses munitions. »
Au soir du 27 février, le bourg de La
Gaubretière était réduit en cendres,
comme un grand nombre de métairies. Une grande
partie du bétail fut tuée sur place.
La colonne de Huché reprit sa route vers St-Malo-du-Bois qu'elle incendia, puis vers St-Laurent-sur-Sèvre.
En février, une trentaine de personnes
sont massacrées dans le bourg du Puiset. Alors des habitants se
disent que le bois de Leppo serait un bon refuge.
Le 8 mars, du
général Grignon au générai en chef, depuis Vezins
« J'ai fait ensorte
d'exécuter tes ordres. Je me suis rendu à la hauteur d'un moulin que j'ai brûlé. Ayant appris qu'une
partie des brigands
était à la Plaine et l'autre à Chanteloup, j'ai dirigé ma marche
sur la Plaine. Ils venaient d'en partir pour rejoindre leur bande à Chanteloup.
J'ai disposé ma troupe sur trois colonnes pour envelopper ce village. L'ennemi
ne nous a point
attendus ; il s'est porté partie sur Vezins et partie sur Izernay.
J'ai continué ma marche sur Vezins, où je
suis maintenant à bivouaquer
sur les hauteurs, en attendant tes ordres. L’ennemi s'est dirigé sur Tout-le-Monde.
J'attends
du pain, de l'eau-de-
vie et la cavalerie que tu m'as promis. »
C’est pendant ces journées qu’à Yzernay une colonne a encore massacré quelques dizaines de personnes
dont des enfants.
Par exemple, à Villefort,
furent massacrés trois soeurs
Grolleau et leurs 5 enfants
et au même endroit, de Villefort,
fut massacrée une partie de la famille Robereau/Gabily
Le 12 mars, les
soldats républicains de la 9ème colonne de Cordellier mettent le feu au
bois de Leppo dans lequel avaient
trouvé refuge les habitants.
Contraints de quitter la forêt pour échapper aux flammes, les villageois
s’enfuient sur la route de Villeneuve ;
56 habitants sont massacrés atour de la Forêt de Leppo, dont de
nombreux enfants
Parfois une famille entière disparaît ; ainsi Julien Chauvire et Anne Guerin, déjà décédés, ont perdu 10 descendants le même jour.
dans la ferme de René Chauviré et Renée Ruiller,
»Ce 12 mars 1794, à Villeneuve, sont
péris de mort violente:
- Renée Ruiller, 50 ans, veuve de René Chauviré
- René Chauviré, 22 ans, (fils de Renée Ruiller)
- Renée Chauviré , femme de Michel Godefroy (fille Renée Ruiller)
- Michel Godefroy, fils de Michel Godefroy et Renée Chauviré (petit-fils de Renée Ruiller)
et aux Ajoux, la famille de Julien Chauvire et Louise Billoteau
- Jeanne Chauvire, femme de Jacques Godefroy (fille de Julien Chauvire et Louise Billoteau)Le 14 mars,
à Nueil et aux Aubiers dans le nord des Deux-Sèvres, la colonne de Grignon a massacré un grand nombre d'enfants dont seulement ceux-ci sont connus avec certitude :
Jean Michaud, 4 ans ; Marie-Anne Michaud, 3 ans ; Pierre Papin, 10 ans ; Perrine Turpeau, 7 ans ; Marie Turpeau, 9 ans ; Marie Bouju, 9 ans ; Pierre Lhomedé, 4 ans ; Marie Lhomedé, 2 ans ; Marie-Anne Rivière, 5 ans
Le 15 mars,
Début mars 1794,
la colonne de Cordellier
va massacrer de nombreuse personnes à
ou autour du Puiset Doré ; ces faits
sont relatés ici.
Pendant cette période Cholet s’est vidé de ses habitants
qui ont trouvé refuge dans les communes de environs en espérant ne pas être
découverts par les bleus.
Malheureusement, le 23 mars, Cordellier
part, avec sa Colonne, du Couboureau, près Tiffauges, à
destination de Vezins.
Le 24, au matin, après avoir cantonné peut-être à la Romagne, la
troupe des Bleus s'avance en direction de Cholet et dans les ruines des
maisons de la Séguinière, incendié par Turreau, le 6 du
même mois, sept femmes entourées
d'une quinzaine d'enfants sont découvertes et massacrées, tous réfugiés Choletais.
Trois kilmomètres plus
loin ils sabrent les deux soeurs
Jamin, âgées de 40 ans , environ, chez elles à la Druère
Encore quelques
kilomètres et se sont 8 personnes
massacrées à St Melaine de
Cholet.
On peut suivre la progression, à la liste des morts de ferme en ferme... La
Meilleraie, le moulin Grangeard, Belébat, la Touche-Aubet, la Grange, où sont massacrées 8 personnes, dont des enfants
Le 24 mars au
soir, la colonne de Cordellier reste
à Cholet où elle se sépare en deux groupes ; le premier va massacrer au
moins 9 personnes autour de
l’église St Pierre, alors que l’autre groupe va écumer le haut de la
Ville, Huchepie, Devau et Pineau, faisant au moins 17 morts, dont Marie Moreau, gd-mère de Louise
Barbier.
Pour la seule journée
du 24 mars 1794, on dénombre plus de 70 personnes massacrées, à Cholet ou autour, et beaucoup de morts n’ont pas été
recensés.
le 25 mars, grâce à la trahison de l'infâme Porcher, les quartiers de Stofflet et son
hôpital de campagne, dans la forêt de Vezins sont envahis par les
colonnes de Crouzat et de Grignon, et plus de 1500 personnes désarmées sont massacrées,
Le 26
mars. Le lendemain, les Bleus, les mains et les habits tout imprégnés de sang,
les sacs pleins de toute sorte de bijoux qu'ils ont enlevés aux victimes, vont
camper au fief des Ouleries, dans la paroisse des Echaubrognes
Il y sera érigé après
la tourmente « Le Cimetière des Martyrs
», haut lieu de la Mémoire.(voir
ici le récit de ce massacre)
Le 27 mars, Grignon
est revenu à Cholet, et il se
signale encore par de nombreux
massacres.
Il s'est installé près
de l'église Saint-Pierre, dans ce qui reste de la maison La Boulaye,
en partie brûlée.
C'est là qu'on lui
amène de pauvres gens découverts ici et là...
En fait de jugement, il
se contente de les faire passer devant lui et prononce simplement, d'un ton
goguenard :
" Un billet
d'hôpïtal ! "
Tout aussitôt, on
entraîne le prisonnier et on le fusille, séance tenante, soit dans l'enclos du vieux
cimetière (place Saint-Pierre actuelle), soit plus loin, vers les
Barrières.
Le 28 mars, une
vingtaine de personnes cachées dans un sous-terrain, datant des guerres
de religion, sous la Blanchisserie du Bordage Marc, actuellement rue
Porte-Baron à Cholet sont sabrées dès leur sortie de la cachette, d’après l’Abbé
Boinaud, curé de St Pierre de Cholet ; elles auraient été
découvertes par les aboiements d’un petit chien.
Le 28 mars, la
colonne de Grignon se rend de Cholet à Mortagne, et on lui
attribue les massacres perpétrés dans les prés de la Basse , la Haute
et la Girardière de Cholet
Le même 28 mars
, la colonne de Crouzat quitte Maulévrier pour Mortagne en
passant par la Tessoualle, via le Pont Bertrandt ; on lui
attribue les massacres perpertrés à la Papotière, la Charoussière,
et la Tricoire
Début avril, l’armée de Stofflet tient si bien la
région que les Bleus ne quittent plus les grands axes, et commettent leurs massacres
de manières très sporadiques.
Le 1er avril, l’adjudant général Cortez et son bataillon de Saône et
Loire est à Chantonnay.
Le 4 avril Crouzat incendie Torfou.
Le 5 avril, depuis Montaigu, Turreau écrit
au Ministre de la Guerre :
« Il
n'existe maintenant dans la Vendée que deux corps de rebelles qui méritent
quelque attention, celui commandé par Stofflet,
et l'autre par Marigny. Ils ont à leur poursuite deux fortes colonnes
de soldats républicains, l'une commandée par l'adjudant-général Dusirat, et l'autre par le général de
brigade Grignon qui a battu Stofflet trois fois de suite , et qui
l'aurait battu une quatrième, si les troupes exténuées eussent voulu donner
plus. »
Le 5
avril, Dusirat écrit au Général Turreau :
« Grignon campe aujourd'hui en avant de Vezins ; il
m'enverra du pain au Bois-Grolleau, en avant de ChoIet où je vais
prendre position, tandis que mon avant-garde surveillera la forêt de
Breuil-Lambert à la position de Mazières… »
Du 4 au 6 avril, cette avant-garde de
Dusirat, campée du côté de Mazières, visite un certain nombre de
fermes : la Goubaudière, la Boume, les Loges de Toutlemonde... où eurent
lieu d’autres massacres.
le 6 avril Grignon passe à Joué-Etiau. Le maire Proust lui communique deux listes de noms. 200
personnes sont listées comme « modérées » et 48 autres comme
royalistes. Ces 48 dernières seront fusillées dans le champ des Brediennes, tout près des
Rebretières.
Vers le 7
avril, à Chanzeaux, 170
habitants dont 3/4 de femmes et d’enfants, sont massacrés par la colonne de Dusirat.
Le 9 avril, Dusirat subit une lourde défaite à Chemillé et depuis Doué , il écrit à Turreau :
“Tu n’as
pas d’idée de l’esprit règne dans nos troupes et surtout parmi les officiers.
On murmure hautement contres tes dispositions.
Je ne veux
pas justifier ma seconde défaite, mais je n'ai été complètement mis en déroute
que parce que j'ai voulu vaincre d'une manière décisive. J'aurais pu me
contenter d'une légère escarmouche, mes dispositions étaient assez sûres pour
que je pusse me retirer en bon ordre et ayant l'air d'avoir battu l'ennemi ;
mais j'ai été trompé et par mes troupes et par les brigands.
Mon
général, la guerre de la Vendée n'est pas encore terminée.... Cependant toutes
les colonnes sont rentrées à Doué. Je sens la nécessité de tenir les brigands
en haleine, et je pars, la rage dans le cœur, demain avec les bataillons de la
Marne, d'Orléans, de Blois, de Senlis, de Melun , les chasseurs des Ardennes et
cent cinquante dragons du deuxième régiment. Le tout formera une colonne de 2
400 hommes. Je serai sous Mortagne le 12.
Comme il
est impossible que je puisse agir offensivement avec si peu de monde, et
surtout avec des bataillons qui n'ont jamais fait la guerre, et que j'ai
beaucoup de choses à te dire, je me propose, à moins d'ordre contraire, de me
rendre à Montaigu pour conférer avec toi, le 13, et je laisserai pendant ce
temps mes troupes sous le commandement de Travot. »
le 18 avril – 13 personnes furent surprises et massacrées par des soldats républicains à La
Chapelle-du-Genêt.
Parmi elles se trouvaient Jeanne Lantier, veuve Mondain, âgée de 36 ans, et
quatre de ses cinq enfants.
Le récit de cette tuerie a été collecté auprès de témoins oculaires par l’abbé
Félix Deniau :
« Mme Mondain,
(Françoise Lantier) qui habitait ce bourg venait de le quitter avec ses six
petits enfants dont le plus grand n’avait que 9 ans ; elle s’acheminait vers le
moulin du Pont, lorsque deux Bleus, détachés de leur corps, tombent sur elle,
et la somment, pour conserver sa vie, de leur livrer ses bijoux ; elle
s’exécute, mais les féroces soldats, non satisfaits de l’avoir dépouillée, lui
disent :
« Maintenant que tu n’as plus rien, brigande, tu vas mourir, et
aussitôt ils la frappent à coups de sabre, lancent en l’air ses plus petits
enfants, les reçoivent sur la pointe de leurs baïonnettes et transpercent les
plus grands. Quand ils croient que ces enfants n’ont plus de vie, ils donnent
le coup de grâce à la pauvre mère que, par un raffinement de cruauté, ils font
mourir la dernière. Après leur départ, les jeunes Raimbault et Poilâne, âgés de
12 ans, cachés dans les branches d’un chêne voisin et qui avaient été témoins
de ce massacre, accourent près des victimes et trouvent respirant encore l’un
des garçons et l’une des petites filles. Ils les transportent à la Fallette,
métairie voisine, où les demoiselles Langlois leur prodiguent les soins les
plus empressés. Le petit garçon qui avait la poitrine blessée de sept coups de
baïonnettes guérit de ses blessures ; mais la petite fille succomba. »
le 24 avril - Rapport de
l'adjudant-général Dusirat, au camp
près de St-Florent-le-Vieil, au général en chef Turreau.
« J'ai attaqué Chaudron, conjointement avec la
garnison de St-Florent ; les
brigands l'ont évacué à mon approche et j'ai pris position à cinq quarts de
lieue de St-Florent pour en recevoir
mes vivres aujourd'hui. Quatre heures après, la troupe de Stofflet, réunie à
celle qui avait évacué Chaudron ,
est venue attaquer ma colonne sur deux points. Ma gauche a plié et a été mise
en fuite ; j'arrive de St-Florent,
je la rallie, je mets à mon tour les brigands en fuite ; je les fais
poursuivre par mes éclaireurs et ma cavalerie , et je prends poste à une lieue
de St-Florent.
Tu vois que dans les parages que je parcours on n'est pas le maître de n'avoir
pas une affaire générale j la preuve de cela, c'est que sur six affaires que
j'ai eues les brigands m'ont attaqué quatre fois.
J'ai eu trente blessés et une vingtaine de tués, les brigands n'ont pas perdu autant que moi.
On a évalué le rassemblement qui m'a attaqué hier à trois ou quatre mille
hommes, ils étaient presque tous habillés de bleu. Je ne crois pas qu'une seule
colonne puisse venir à bout de Stofflet. Il faut de nouvelles troupes, les
nôtres sont intimidées, je ne cesserai de te le répéter. »
le 25 avril – suite de ce rapport de Dusirat, à Turreau
« Comme
je te le mandais ce matin, je devais recevoir aujourd'hui mon pain de St-Florent, et je devais partir demain
, après avoir reçu des cartouches de cette place.
Le pain ne m'a été fourni aujourd'hui que pour un jour, et je ne recevrai celui
qui m'est nécessaire pour me mettre en route que cette nuit ou demain.
Je te l'avoue, citoyen général, ces contrariétés et ces retards rendent ma
besogne bien pénible, bien dégoûtante ; mais tu peux compter toujours sur mon
zèle …
Je te parle vrai, citoyen général, le cri de « Voilà les brigands !»
inspire une telle terreur à nos soldats, que, même à St-Florent, derrière des
retranchement, on éprouve l'effet de ces termes magiques, et je puis t'assurer
que s'il est quelque lieu au monde où la terreur soit à l'ordre du jour, c'est
à St-Florent et dans quelques
bataillons de ma colonne.»
Le 4
Le 10 mai, Dusirat incendie la forêt de Vezins et les stocks de grains
et farine qu’il y trouve.
le même jour il incendie le village d’Yzernay et le rase
Mais les massacres,
les pillages, les incendies, les viols vont durer au moins jusqu'à la mi-mai,
où Turreau est suspendu, avant
d'être arrêté le 29 septembre 1795,
après la chute de Robespierre, puis acquitté le 19 décembre 1795 par un tribunal militaire qui juge qu'il n'a fait
qu'exécuter les ordres.
Le 13 mai,
Le 3 juin, le général Cambray trouve encore des moulins à brûler et des personnes à tuer sur la route de Jallais à Montrevault, le même jour, Dutruy
avoue avoir occis cent cinquante brigands à Mouilleron le Captif.
Le 6 juin,
des soldats républicains massacrent 6 habitants au lieu-dit « Bois Giraud» de
St Philbert en Mauges.
Le 7 juin, l’Adjudant Général Delaage rapporte :
Les brigands qui étoient avec Stofflet l’ont abandonné pour la plupart et beaucoup de laboureurs et d’ouvriers ont été tués à leurs travaux habituels - à Roussé (Roussay) et Saint Macaire 4 ordonnances ont tué 29 personnes.
Ces deux jours de marche ont couté à l’ennemi au moins 300 hommes, sans compter les femmes et les enfants. »
.
Le 10 juin, il poursuit : Le 24 janvier, Turreau écrit au Comité de Salut Public : « Mes colonnes ont déjà fait des merveilles; pas un rebelle
n a échappé à leurs recherches... Le 8 février, Turreau reçoit enfin une réponse à ses 3 demandes de confirmation
de sa mission ; Lazare Carnot écrit :
Hentz et Francastel, du Comité de Salut Public, écrivent dès le 21 avril 1794 :
« 50 brigands tués dans les villages voisins , 400 paquets de cartouches, trouvées par un chasseur du 3e dans l’église de Saint Crespin, 20 barriques d’eau de vie et 40 pièces de vin enfoncées, environ 80 hommes passés à la bayonnette près le village de Cugan (Cugand), 60 tués dans la fuite – 140 platines de fusils prises chez un armurier, et environ 100 femmes conduites à Montaigu – La colonne de Delaage étoit de 4 à 5 mille hommes. »
le 23 juillet 1794, alors que la Vendée est anéantie, Lazare Carnot
écrit aux représentants du peuple :
”Hâtez-vous au contraire chers collègues de livrer au glaive vengeur tous les
promoteurs et chefs de cette guerre cruelle et que les scélérats qui ont
déchiré si longtemps les entrailles de leur patrie reçoivent enfin le prix de
leurs forfaits. Les femmes, les enfants et les vieillards, les individus
entraînés par la violence ne méritent pas sans doute le même sort que les
monstres qui ont ourdi la révolte, qui l’ont servie de leur volonté comme de
leurs bras, et l’on pourrait prendre à leur égard des mesures de sûreté moins
rigoureuses, mais ce serait abandonner le pays aux horreurs d’une guerre
nouvelle et la vie des patriotes à la merci des brigands que d’user envers
ceux-ci d’une indulgence absurde et meurtrière.”
********
Si mes intentions sont bien secondées,
il n'existera plus de Vendée, sous quinze jours, ni maisons, ni armes, ni
subsistances, ni habitants que ceux cachés dans le fond des forêts, car je
désespère de pouvoir incendier les forêts si vous n'adoptez pas les mesures que
je vous propose. Il faut que tout ce qui existe de bois de haute futaie dans la
Vendée soit abattu.
Je
vous invite, Citoyens Représentans, à vous occuper au plus tôt de l'arrêté à
prendre à cet égard,.. des indemnités à accorder à ceux dont les habitations
sont incendiées, à charge par eux d'aller habiter une autre contrée. Il faut
qu'elle soit évacuée en entier par les hommes même qu'on croit
révolutionnaires, et qui, peut-être, n'ont que le masque du patriotisme. »
« Tu
te plains , citoyen général de n’avoir point reçu du Comité une approbation
formelle de tes mesures. Elles lui paraissent bonnes et tes intentions
pures ; mais éloigné du théâtre de tes opérations, il attend les grands
résultats pour prononcer dans une matière sur laquelle on l’a déjà trompé tant
de fois aussi bien que la Convention nationale. », il poursuit :
”Extermine
les brigands jusqu’au dernier voilà ton devoir. Nous te prescrirons surtout de
ne pas laisser une seule arme à feu dans les départements qui ont participé à
la révolte et qui pourraient s’en servir encore. Armes en les soldats de la
liberté. Nous regarderons comme traîtres tous les généraux, tous les individus
qui songeraient au repos avant que la destruction des rebelles soit entièrement
consommée. »
« Vous pouvez être assurés que la Vendée est un désert et qu’elle ne contient pas 12000 personnes vivantes. »
***********
Les viols : Pendant toutes cette
période nous relevons un nombre anormalement élevé d'enfants naturels chez les
jeunes femmes célibataires ou veuves, dans la tranche d'âge - dix huit, vingt
sept ans – qui ont échappé aux tueries.
Ainsi pour la ville de Beaufort-en-Vallée, on déduit que la troupe républicaine
porteuse de tous les vices a dû quitter la ville vers octobre ou novembre 1794, car à partir
du premier messidor de l'an 3 (19 juin 1795) au 5ème jour complémentaire (21
septembre 1795) de la même année, nous ne rencontrons plus d'enfants naturels
dans les registres de l'état civil.
Les massacres du général divisionnaire Marc-Antoine Commaire:
Aizenay : 1794. Commaire poussa si loin la barbarie contre les
habitants d'Aizenay que la municipalité de ce bourg crut devoir porter plainte
devant l'autorité supérieure. "
Grignon, disait-on dans ce rapport, a donné l'exemple inique du massacre
des patriotes. On l'a vu par passe-temps, et pour essayer le tranchant de son
sabre, couper en deux des enfants à la mamelle ; il appelle cela une
distraction patriotique. Commaire a été plus loin ; il en a fait une
loi. Nous le voyons, chaque jour, prendre les premiers enfants venus, fils de
républicains ou de brigands, peu lui importe : il les saisit par une jambe, et
les fend par moitié, comme un boucher fend un mouton. Les soldats en font
autant. Si les autorités veulent réclamer, on les menace d'être fusillés."
De très jeune combattants royalistes
le Chanoine Louis Tricoire dans son ouvrage
« Cinq Siècles de Vie Paroissiale – Saint-André-de-la-Marche. »
déclare :
... Il y eut aussi, parmi les
partants de St-André, de très jeunes gens. Si Jacques Birot du
Vivier et Pierre Blouin ont respectivement 17 et 18 ans, trois de leurs camarades ne sont pas encore dans leur
seizième année : François Chalet qui, aux côtés de son
père, participera aux batailles de Luçon, Saumur, Cholet et
Beaupréau ; François Morinière des Quatre Etalons, qui
assistera à vingt cinq batailles ; Pierre Tinguy, originaire
de la Renaudière, tisserand à Saint-André, qui après le passage de la Loire se
joindra à l'armée de Charette.
Deux garçons viennent tout juste d'entrer dans l'adolescence : René
Leroux, un indigent de 15 ans, qui part en 1793 pour ne revenir qu'après
1815 ; René Tournery, baptisé à Bouzillé, qui prendra ses
15 ans en août 1793, alors qu'il est affecté dans l'artillerie à
la conduite d'un canon dont le maniement lui est interdit. Les autres sont des
enfants qui, âgés de 11 ou 12 ans en 1793, se contenteront d'abord d'accompagner
l'armée avant de pouvoir se battre en 1795, 1799 et 1815. Tels : Jacques
Barraud, établi vers 1824 marchand tisserand à Saint-André ; André
Rullier ; Jean Barré dont le père fut tué à la déroute de
Cholet ; Jean Bizon, qui a 12 ans,
était à l'affaire de Jallais ; François Dabin, orphelin, qui
vit les combats de Luçon, Fontenay, Saumur, Nantes, Cholet et Beaupréau (son
frère fut tué dans la Virée de Galerne) ; Julien Humeau, originaire
de Saint-Macaire tisserand à Saint-André en 1824 après avoir été caporal à la
première compagnie de Saint André dans l'armée d'Autichamps ; René
Libault, qui perdit son père à la bataille de Luçon ; René
Naud, tisserand au bourg après 21 ans de campagne, de 1794 à
1815............... »
Turreau montre dans ce texte de
novembre 1793 tout « l’amour »
que la république peut porter à ses défenseurs…
”On se plaint, dans les rapports, de la trop grande quantité de blessés et de
malades qui encombrent l’armée, et peuvent paralyser ses mouvements.. Les
blessés et les malades, étant francs républicains comme nous, doivent, comme
nous, se sacrifier au salut commun. En cas d’absolue nécessité, nous autorisons
donc, dans l’intérêt bien entendu de la chose publique, à se défaire le plus
humainement possible de tous ceux qui, par raison d’état sanitaire,
apporteraient un préjudice quelconque à la marche ou au succès des troupes
républicaines. Le patriotisme et la fraternité des généraux décideront des cas
où le salut de la république commandera impérieusement ces sacrifices. »
Le ressenti des éxécutants
On trouve aussi quelques extraits de
lettres de subalternes acceptant difficilement le travail qu’on les force à réaliser
:
- le capitaine Dupuy. du Bataillon de la Liberté, adresse ceci à sa
soeur les 17 et 26 nivose (janvier 1794) :
“ Nos
soldats parcourent par des chemins épouvantables les tristes déserts de la
Vendée... Partout où nous passons, nous portons la flamme et la mort. L'âge, le
sexe, rien n'est respecté.
Hier, un de nos détachements brûla un village, un volontaire tua de sa main
trois femmes. C'est atroce, mais le salut de la République l'exige
impérieusement...
Quelle guerre !... Nous n'avons pas vu un seul individu sans le fusiller.
Partout la terre est jonchée de cadavres; partout les flammes ont porté leur
ravage.... etc. etc.”
Pierre-Louis
Cailleux, du bataillon de Senlis, le 4 septembre 1793, est passé en mars 1794, à
l'armée de l'Ouest, en position à Doué la Fontaine ; il raconte sa campagne au
travers des Mauges :
- Dans
cette ville (Doué) nous avons commencé à concevoir ce que c'était que les
horreurs de la guerre. Toutes les maisons étaient dévastées et pillées par les deux armées ; cette ville a été prise par
trois fois sur les brigands...
..et le 5 avril nous nous sommes mis en marche pour aller nous battre contre
l'armée royale...quelle fut ma surprise, lorsqu'en entrant dans le bourg de
Vihiers, le premier objet qui frappa ma vue fut des cadavres d'hommes, femmes et
enfants, qui étaient massacrés et jonchés par les rues et dans les décombres fumants des maisons
qui ont été consumées par le feu. J'avoue avec franchise que j'ai frémi et tressailli de
l'horreur d'un tel spectacle...
... le 14 avril nous nous sommes battus rangés en ordre de bataille à quinze
pas l'un de l'autre ; après avoir tiré chacun cinq à six coups de fusil, la
victoire fut à nous. Nos ennemis ont battu en retraite, avec une perte de 300 hommes et nous
100 hommes hors de combat. Nos blessés furent pansés et mis dans des chariots pour
les transporter à Nantes ; mais comme l'escorte qu'on leur avait donnée était
peu considérable, les brigands ont tombé dessus le convoi avec une telle
impétuosité qu'ils ont massacré tous nos pauvres blessés ; il n'y eut que ceux qui avaient
bonne jambe qui se sont sauvés et qui ont rejoint notre colonne...
...Le 21 avril 1794, nous sommes passés dans la ville de Cholet, ville assez considérable
qui a été réduite en cendres. Tous les jours dans la marche on en massacrait quelqu'un, de
manière que les routes par où nous passions étaient jalonnées de corps morts...
...Nous
sommes retournés ensuite à Concourson par une autre route, comme si nous étions
à la chasse, tuant tout ce que l'on trouvait sur la route et dans les villages, même
jusqu'aux chiens. Enfin tous les décombres qu'il y a dans toutes les villes, bourgs et
villages attesteront les ravages d'une guerre terrible et cependant nécessaire.
Ces contrées qui sont des plus belles de la république sont fertiles en grains,
vins, fruits ; il y a une grande quantité de bestiaux et de volailles, il se
fait beaucoup d'élèves. Les femmes sont très propres pour leur ménage et
entretiennent leurs meubles dans la plus grande propreté ; on se voyait dans
les meubles presque aussi bien comme dans un miroir ; c'était bien dommage de
brûler de si beaux meubles et de si jolis linges...
- Beaudesson, régisseur général des subsistances militaires, qui avait
suivi de Doué à Cholet la Division Bonnaire, faisait quelques
mois plus tard, à Saumur, les déclarations suivantes :
« La route
de Vihiers à Cholet était jonchée de cadavres, les uns morts depuis trois ou
quatre jours et les autres venant d'expirer. Partout, les champs voisins du
grand chemin étaient couverts de victimes égorgées... Ça et là, des maisons
éparses à moitié brûlées...etc. »
Dés le 21 janvier 1794, Tureau
s’est installé à Cholet protégé par 4000 à 5000 hommes de la Légion du
Nord
A son arrivée Turreau s'arroge le
droit de faire fusiller lui-même les prisonniers que ramènent ses soldats, sans
passer par le Comité Révolutionnaire dont s'est la tâche depuis le début
du conflit :
« Encore
un de pris dans nos filets !...,écrit-il, le 24, au Ministre de la
Guerre, " un nommé Dutrehan, capitaine de cavalerie d'un corps
de rebelles. Sera demain fusillé par mes ordres, conjointement avec M.
Meleux, notaire royal et apostolique de la paroisse de Jallais, dont
le fils était trésorier de l'arnnée catholique... "
De fait, tous
deux sont fusillés dans l'Ouche du Moulin de la Motte.
Du haut des murs d'enceinte du château,
des soldats et des badauds, coiffés du bonnet rouge, assistent à la scène.
Est-ce de cette exécution ou d'une autre analogue que veut parler un témoin
oculaire, Boutillier de Saint André qui, vers celle époque, vient de Mortagne
a Cholet, pour visiter sa mère, gardée prisonnière ... :
"
Vers la fin de janvier, écrit-il dans ses Mémoires, je fus à Cholet et partis
avec un jeune domestique...
Il faisait grand froid ; il était tombé beaucoup de neige, et la blancheur de
la terre couvrait a peine les nombreux cadavres restés après la bataille du
14 octobre...
En arrivant à Cholet, nous passâmes par le chemin bas de la rivière pour nous
rendre à Saint-Pierre.
Rendus vis-à-vis le petit pré du Moulin de la Motte, un spectacle
effrayant vint encore attrister nos regards.
On venait d'y fusiller un homme qui y était couché nu ; et un grand nombre de
curieux réunis sur la place regardaient ce spectacle affligeant avec une
avidité cruelle... "
René Chollet grenadier au 4e bataillon de la Charente-Inférieure
à l'armée des Sables, écrit, le 25 pluviôse an II [13 février
1794]. une lettre à son père, chapelier
à Beaufort-en- Vallée. En voici un extrait :
" ... Je vous ambrasse le plus
profont de mon cœur à tous et je soite que votre santez soit égale à la
mienne... Je vous apprent que la geure de Lavandée [guerre de la Vendée] est
bien avancé, Nous avons tues tout
homme et femme et enfant et mis le feu partout dans tous les endroits et il a boucoup de quadabre de mort dans les chemin et fossez mais nous avont peur que la
peste se mette dan l'androit... "
Mémoires de Lucas
de la Championnière, ancien officier du général Vendéen Charette. Il parle
ici de Châtillon-sur-Sèvre (aujourd’hui Mauléon) :
« On continua la route sans incident jusqu’à
Maulévrier : nous trouvâmes à Châtillon les traces encore récentes du combat
qui y avait eu lieu ; la ville était entièrement incendiée, quelques petites maisons encore
debout étaient remplies de femmes ; pas un homme dans tout le pays. Outre les
fosses immenses qu’on voyait à l’entour de la ville, des cadavres à demi-rongés couvraient encore le grand
chemin de Bressuire ; le carnage d’après ces indices avait dû être affreux. »
Mémoires de
Boutillier de Saint-André, habitant de Mortagne-sur-Sèvre, qui fuit l’horreur
en direction des Herbiers.
« En
arrivant aux Herbiers, nous trouvâmes tout le bourg dévoré par les flammes. Les républicains y avaient
passé le jour d’avant et y avaient mis tout à feu et à sang. Les maisons
brûlaient encore ; les charpentes, les couvertures s’écroulaient de toutes
parts avec un fracas épouvantable. Des tourbillons d’étincelles et de fumée
s’élevaient des ruines comme des trombes de poussière.
Des
cadavres gisaient dans les rues. Nous ne vîmes dans ces lieux désolés
que quelques chats qui n’avaient pas encore abandonné leurs demeures détruites.
»
Dénonciation
devant les membres du comité de surveillance de la société populaire de
Fontenay-le-Peuple (redevenu aujourd’hui Fontenay-le-Comte). La femme qui se
plaint ici est une républicaine, son seul défaut est d’habiter la Vendée ; nous
respectons l’orthographe du temps :
« A
comparu la citoyenne Marianne Rustand, de la commune du Petit Bourg des
Herbiers, qui a déclaré que, lorsque les volontaires de la division de Grignon
sont arrivés chez elle, elle fut au-devant d’eux pour leur faire voir un
certificat qu’elle avoit du général
Bard, et leur offrit à se rafraîchir, mais que ceux-ci, plus furieux que des
tygres, lui avoient répondu qu’ils en vouloient à sa bourse et à sa vie ; lui
ôtèrent environ quarante-deux livres, seul argent qu’elle avoit. Non contens de
cela, ils l’obligèrent, en la menaçant, à rentrer chez elle pour leur montrer l’endroit où elle pourroit
en avoir caché. Dès qu’elle fut entrée, quatre d’entr’eux la prirent et la
tinrent, tandis qu’au moins vingt de leurs camarades assouvirent leur brutale passion pour
elle, et la laissèrent presque nue. Après quoi, ils furent mettre le feu dans
les granges ; ce que voyant la déclarante, elle ramassa toutes ses forces pour aller
faire échapper ses bestiaux : ce que trois d’eux voyant, ils coururent après
elle pour la faire brûler avec ses bœufs. Et étant enfin parvenue à s’en
échapper, elle se rendit auprès de sa mère, âgée d’environ soixante-dix
ans, lui trouvant un bras et la tête coupés, après lui avoir pris environ neuf cents
livres,
seul produit de ses gages et de leur travail ; enfin elle fut obligée de
l’enterrer elle-même. Après quoi, elle se couvrit des hardes qu’on avoit
laissées chez sa mère, et parvint enfin à se rendre chez le citoyen Graffard
des Herbiers, où elle fut en sûreté, et a déclaré ne savoir signer.
Signé
Bossin, Guilet, Belliard, Massé. »
Registres clandestins de l’abbé Robin,
prêtre caché à la Chapelle-Basse-Mer, en Loire-Atlantique.
« Là
c’étaient de pauvres jeunes filles toutes nues suspendues à des branches
d’arbres, les mains attachées derrière
le dos, après avoir été violées. Heureux encore quand, en l’absence des Bleus, quelques
passants charitables venaient les délivrer de ce honteux supplice. Ici, par un
raffinement de barbarie, peut-être sans exemple, des femmes enceintes étaient
étendues et écrasées sous des pressoirs.
Une pauvre femme, qui se trouvait dans ce cas, fut ouverte vivante au
Bois-Chapelet, près le Maillon. Le nommé Jean Laîné, de la Croix-de-Beauchêne, fut brûlé vif dans son lit où il était retenu pour cause
de maladie. La femme Sanson, du Pré-Bardou, eut le même sort, après avoir été à
moitié massacrée. Des membres sanglants et des enfants à la mamelle étaient portés en
triomphe au bout des baïonnettes.
Une
jeune fille de la Chapelle fut prise par des bourreaux, qui après l’avoir violée la suspendirent à
un chêne, les pieds en haut. Chaque jambe était attachée séparément à une branche
de l’arbre et écartée le plus loin possible l’une de l’autre. C’est dans cette
position qu’ils lui fendirent le corps avec leur sabre jusqu’à la tête et la séparèrent
en deux. »
Le 17 avril 1794,
Lequinio livre au Comité de Salut Public de nombreuses pièces relatant les
exactions des généraux des colonnes :
« Le général Grignon arrive aux Essarts, dit Chapelain, maire
de La Flocelière; il fait égorger,
sur une liste insignifiante, 20 jeunes gens qui s'étaient conformés à la proclamation des
représentants du peuple, avaient remis les armes et se comportaient bien, ils
m'avaient, en qualité de commissaire du district, aidé à briser les cloches de
dix églises, et a désarmer au moins deux cents Brigands.
Il fit égorger des officiers
municipaux eu écharpe, et cela par
une erreur de nom qu'il ne donna pas le temps d'expliquer. Dans le reste de la
paroisse il fusilla de toutes mains, sans exception ni formalité.
Par ordre de Grignon, on m'arracha mon habit pour me fusiller. Un soldat
me reconnut pour avoir suivi pendant toute la
guerre les troupes de la République ; je prononçai le nom de mon ami le général
Joba , avec qui j'avais plusieurs fois donné
la chasse aux Brigauds.
Je parlai avec toute l'autorité de la vérité et l'ascendaut de la vertu. Dix hommes de ma garde nationale furent sabrés, dont deux furent mal tués et en réchappèrent.
A la Flocelière, j'offris de lui douner une liste des grands coupables. Il me
dit que c'était inutile. Il fil
égorger les hommes de ma commune
sans me consulter. La troupe pilla, incendia à tort et à travers.
Je ne mentionne pas les cadavres
épars faits par les soldats. On viola les femmes, on coupa un patriote et sa
servante en morceaux, ainsi que deux vieilles femmes, dont l'une était en
enfance, 1
Je lui disais un soir : « Il y a quelques métairies
ici où l'on trouverait bien de l'argent » Il crut que je voulais les
faire piller, et me dit : « Voilà où je vous reconnais
Républicain. »
Je baissai les yeux et ne répondis pas. Il disait un jour : « On est bien
maladroit, on tue d'abord : il faudrait d'abord exiger le portefeuille, puis
l'argent sous peine de la vie ; et quand on aurait le tout, on tuerait tout de
même, «
Il voulut aller à Pouzauges; il me prit pour guide. Il y avait de jolies
prisonnières au château. Après dîner, Grignon et l'état-major allèrent
prendre le café de Cythère avec elles ; elles furent après fusillées.
Le commandant de la garde nationale du Boupère et la municipalité vinrent à La
Flocelière consulter Grignon ; il leur
dit qu'il irait les voir, qu'il visiterait la garde nationale.
Je l'accompagnai comme guide : 400 hommes furent
sous les armes; il voulut les faire charger par son escorte ;
il hésita plusieurs fois; le nombre l'intimida; il n'avait que 25 à 30 hussards
et chasseurs.
Les soldats se tenaient prêts à exécuter ce qu'ils appelaient le coup-de-temps.
J'ai entendu dire dix fois depuis à Grignon qu'il avait ouvert la bouche
plusieurs fois pour donner l'ordre, et qu'il se repen-
tait de ne l'avoir pas fait. Il ordonna le désarmement, et le lendemain on lui
remit deux cents fusils; ce désarmement con-
sternait ces braves gens qui avaient rendu des services essentiels.
On partit de La Flocelière après avoir
incendié le bourg.
Grignon m'ordonna de le suivre, et de ne pas m'éloigner de lui. Dans la
route on pillait, on incendiait ; depuis la première
jusqu'aux Herbiers, dans l'espace d'une lieue, on suivait la colonne
autant à la trace des cadavres qu'elle avait faits qu'à la
lueur des feux qu'elle avait allumés.
Dans le procès de Carrier,
le citoyen Thomas, un médecin de Nantes, couvert de vingt-deux blessures reçues
dans diffé-
rents combats contre les Vendéens, fit les révélations suivantes :
« J'ai vu
brûler vifs des hommes, des femmes, des vieillards. J'ai vu 150 soldats maltraiter
et violer des femmes, des filles de 14
à 15 ans, les massacrer en suite, et jeter de baïonnette en baïonnette de tendres enfants restés à côté de leurs mères étendues
sur le carreau ... et l’on n'osait rien dire. »
Les officiers
municipaux d'Aizenay, de Palluau et de La Roche-sur-Yon se plaignent en ces
termes :
« Après le général Grignon, nous espérions,
citoyens, que nos cantons ne seraient plus couverts de sang et incendiés.
Nous avons de nos propres mains tué
tous les Brigands qui étaient dans
nos parages ; mais Grignon avait donné l'incivique exemple du massacre
des Patriotes ; on l'avait vu, par passetemps et pour essayer le tranchant de
son sabre, couper en deux des enfants
à la mamelle : il appelait cela
une distraction patriotique.
Commaire a été plus loin : il en
a fait une loi. Nous le voyons chaque jour prendre les premiers enfants venus,
fils de Républicain ou de Brigand, peu lui importe ; il les saisit par une jambe, et les fend par
moitié comme un boucher fend
un mouton. Ses soldats en font autant. Si les autorités veulent réclamer, on
les menace d'être fusillées, et nous vous écrivons
ceci afin que tous ces malheurs finissent »
Le chef de bataillon David
adressait alors au général Turreau une lettre où se rencontrent
plusieurs des expressions dont les officiers supérieurs enrichissaient le
vocabulaire de la Révolution.
• Nous faisons passer, dit-il, derrière la haie les hommes et les femmes qui nous paraissent susceptibles
d'avoir brigandé ou de pouvoir brigander.
Nous envoyons au quartier général tous ceux que nous déclarons suspects ; mais, par
motif d'économie, nous ne voulons plus user notre poudre à de pareils moineaux.
Nos soldats ont trouvé un moyen plus économique de tuer. Avec la crosse de
leurs fusils ils cassent la tête aux ennemis du peuple; mais je ne te cacherai pas
que ce moyen deviendra à la longue coûteux en diable. Déjà les crosses des
fusils sont presque toutes endommagées; les batteries elles-mêmes s'en
ressentent, et, comme l'ouvrage donne encore, je vais prendre sur moi de faire
distribuer plus de poudre à mes hommes. »
Faire passer derrière
la haie, envoyer au quartier général signifiait en langage révolutionnaire
assassiner.
Au dire des citoyens Morel
et Carpenty, commissaires municipaux à la suite des colonnes infernales,
le général Turreau avait des
moyens presque aussi économiques de tuer.
«C'est avec désespoir que nous vous écrivons,
disent ces commissaires à la Convention, le 4 germinal an II (24 mars 1794);
mais il est urgent que tout ceci cesse. Turreau prétend avoir des ordres
pour tout anéantir, Patriotes ou Brigands; il confond tout dans la même
proscription. A Montournais, aux Epesses et dans plusieurs autres
lieux, Amey fait allumer les fours, et, lorsqu'ils sont bien chauffés, il y jette les
femmes et les enfants. Nous lui avons fait des représentations convenables ; il
nous a répondu que c'était ainsi que la République voulait (aire cuire son
pain.
D'abord on a condamné à ce genre de mort les femmes brigandes, et nous n'avons
trop rien dit ; mais aujourd'hui les cris de ces misérables ont tant diverti
les soldats et Turreau qu'ils ont voulu continuer ces plaisirs. Les
femelles de Royalistes manquant, ils s'adressent aux épouses des vrais
Patriotes. Déjà, à notre connaissance, 23 ont subi cet horrible supplice, et elles n'étaient, comme nous, coupables que d'adorer la
nation.
La veuve Pacaud, dont le mari a été tué à Châtillon par les
Brigands lors de la dernière bataille, s'est vue, avec ses quatre petits enfants, jeter dans un
four.
Nous avons voulu interposer notre autorité; les soldats nous ont menacés du
même sort, »
Les officiers
municipaux des Herbiers ont dressé un long procès-verbal où les
événements sont relatés heure par heure, jour par jour ; il est signé Maruteau,
maire; Jouet, secrétaire greffier.
“ Chaque jour, disent-ils, nous avons donné des
renseignements au générai Amey et nous n'avons pu le décider à aller
reconnaître les Brigands, même une seule fois, soit à Bazoges, soit à Beaurepaire,
soit à La Gaubretière, où ils s'étendaient de jour en jour. Il nous a
fallu souffrir de la douleur de le voir occuper son armée à dépouiller les
maisons mêmes des Patriotes dans les campagnes des Herbiers”
A la date du 12
pluviôse (30 janvier 1794) on
trouve sur ce procès-verbal que, «
dans une distance de trois lieues, rien
n'est épargné : les hommes, les
femmes, les enfants même à la mamelle, les femmes enceintes , tout périt par les mains de sa
colonne. En vain de malheureux Patriotes, leurs certificats de civisme à la
main, demandent la vie à ces forcenés; ils ne sont
pas écoutés, on les égorge. Pour achever de peindre les forfaits de ce jour, il
faut dire que les foins ont été brûlés
dans les
granges, les grains dans les greniers, les bestiaux dans les étables et quand de malheureux cultivateurs connus de nous par
leur civisme ont eu le malheur d'être trouvés à délier leurs bœufs, Il n'en a
pas fallu davantage pour les fusiller ; on a même frappé à coups de sabre des bestiaux qui s'échappaient.”
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Ces détails ne représentent qu’un infime
partie des horreurs révolutionnaires vécues 200 ans plus tôt dans notre région…
Outre la crise démographique,
véritable hémorragie, ces évènements de 1793-1794 auront des conséquences
économiques (fermes et habitations brûlées par les « colonnes infernales »,
récoltes perdues…) et politiques aussi, car cette région garde encore « une
dent » contre les républicains, et reste encore assez ancrée dans ses choix
politiques et religieux vers la tradition.
Au travers des « mémoires de Mme de
Sapinaud » on peut lire la vie à ou autour de St Laurent sur Sèvre, dont un très bref aperçu ici.
Thomas-Alexandre
Dumas,
père de l’écrivain, et général républicain déclara ceci après les combats :
« Le mal est surtout
dans l’esprit d’indiscipline et de pillage qui règne à l’armée, esprit produit
par l’habitude et nourri par l’impunité. Cet esprit est porté à un tel point,
que j’ose vous dénoncer l’impossibilité de le réprimer, à moins d’envoyer les corps
qui sont ici à d’autres armées et de les remplacer dans celle-ci par des
troupes dressés à la subordination […] il vous suffira d’apprendre que des
chefs ont été menacés d’être fusillés par leurs soldats pour avoir voulu,
d’après sur mon ordre, empêcher le pillage […]. La Vendée a été traitée comme
une ville prise d’assaut. Tout y a été saccagé, pillé, brûlé. Les soldats ne
comprennent pas cette défense de continuer aujourd’hui de faire ce qu’ils
faisaient hier... »
« les Vendéens
n’avaient plus besoin du prétexte de la religion et de la royauté pour prendre
les armes ; ils étaient forcés de défendre leurs chaumières, leurs femmes qu’on
violait, les enfants qu’on passait au fil de l’épée […] Je voulus discipliner
l’armée, et mettre à l’ordre du jour la justice et l’humanité. Des scélérats,
dont la puissance a fini avec l’anarchie, me dénoncèrent : on calomnia le
dessein que j’eus d’arrêter le sang qui coulait, on m’accusa de manquer
d’énergie. »
Marie Joseph
Lequinio, député
de la Convention, déclara le 1 avril 1794
« Le pillage a été
porté à son comble. Les militaires, au lieu de songer à ce qu'ils avaient à
faire, n'ont pensé qu'à remplir leurs sacs et à voir se perpétuer une guerre
aussi avantageuse à leur intérêt [...]. Les délits ne se sont pas bornés au
pillage. Le viol et la barbarie la plus outrée se sont représentés dans tous
les coins. On a vu des militaires républicains violer des femmes rebelles sur
des pierres amoncelées le long des grandes routes, et les fusiller ou les
poignarder en sortant de leurs bras ; on en a vu d'autres porter des enfants à
la mamelle au bout de la baïonnette ou de la pique qui avait percé du même coup
et la mère et l'enfant. Les rebelles n'ont pas été les seules victimes de la
brutalité des soldats et des officiers. Les filles et les femmes des patriotes
même ont été souvent « mises en réquisition » ; c'est le terme.
Toutes ces horreurs ont
aigri les esprits et grossi le nombre des mécontents, forcés de reconnaître
souvent moins de vertus à nos troupes qu'aux brigands dont plusieurs, il est
vrai, ont commis des massacres, mais dont les chefs ont toujours eu la
politique de prêcher les vertus, et d'affecter souvent une sorte d'indulgence
et de générosité envers nos prisonniers.
On a fusillé
indistinctement tout ce que l'on rencontrait ou tout ce qui se présentait. Des
communes venant se livrer, leurs officiers municipaux en écharpe à leur tête,
ont été reçues avec une apparence fraternelle et fusillés sur l'heure. Des
cavaliers armés et équipés, venus d'eux-mêmes se rendre au milieu de nous et
après avoir fait plusieurs lieues pour cela, ont été fusillés sans miséricorde
[...].
Si la population qui
reste n'était que de 30 000 à 40 000 âmes, le plus court sans doute serait de
tout égorger, ainsi que je le croyais d'abord ; mais cette population est
immense ; elle s'élève encore à 400 000 hommes, et cela dans un pays ou les
ravins et les vallons, les montagnes et les bois diminuent nos moyens
d'attaque, en même temps qu'ils multiplient les moyens de défense des
habitants. S'il n'y avait nul espoir de succès par un autre mode, sans doute
encore qu'il faudrait tout égorger, y eût-il 500 000 hommes ; mais je suis loin
de le croire. Le peuple du pays est bon là comme ailleurs, et quand on prendra les
mesures nécessaires on l’amènera, malgré son fanatisme actuel et malgré toutes
les fautes que nous avons commises, à entendre la raison et à s'en servir. »
Dès le 23 janvier, le représentant Laignelot dénonce à la Convention
les massacres commis dans les environs de Challans par
les troupes du général Haxo, mais sa
lettre ne provoque aucune réaction. Cependant la défaite des colonnes de Moulin et Caffin, le 8 février,
lors de la troisième bataille de Cholet retentit
jusqu'à Paris et provoque la stupeur de la Convention
A la lecture de tous
ces crimes, est-il encore possible de se demnder si la Vendée a été victime
d’une tentative de génicide ?
L' article L
211 -1 de notre Code Pénal stipule: « Constitue
un génocide le fait en exécution d'un plan concerté tendant à la destruction
partielle ou totale d'un groupe national, ethnique, racial ou religieux ( ...
), de commettre l'un des actes suivants: atteinte à l'intégrité physique ou
psychique, etc... ».
Aucun doute ne subsite ; il y a donc
bien eu un génocide vendéen.
Annexes :
Turreau de
Garambouville, ancien
officier des troupes royales, ayant caché sa particule et une partie de son nom
à la révolution a construit l’opération et met au point l’organisation des
troupes, les itinéraires, les méthodes à employer.
Le 13 mai 1794, il est
destitué. La Convention qui a besoin de toutes ses troupes aux frontières,
évacue la Vendée.Il poursuivra sa carrière sous le Consulat et l'Empire, et
sera même nommé ambassadeur de France aux Etats-Unis. Il s'éteindra
paisiblement en 1816,
François-Joseph
Westermann, né à Molsheim (Alsace) le 5 septembre 1751, guillotiné à Paris le 5 avril 1794, est un général de
l’armée républicaine, resté célèbre pour les atrocités qu'il commit lors des guerres
de Vendée.
Jean-François Moulin, né à Caen (Calvados), le 14 mars 1752 et mort à Pierrefitte-sur-Seine (Seine-St-Denis)
le 12 mars 1810,
Jean-Pierre Boucret : Simple soldat sous l'Ancien Régime,
d'abord au régiment de Vivarais, puis au régiment d'Orléans. Il devient officier de la garde nationale pendant la Révolution française. Il est fait général de brigade le 30 octobre 1793, puis général de division le 9 avril 1794. En Vendée, il commande une des colonnes infernales. En 1795, il commande Belle-Île-en-Mer et repousse une sommation britannique lors de l'expédition de Quiberon. En 1796, il sert à l'armée du Nord. Il est réformé en 1797.
Jean Alexandre Caffin est
gratifié pour cela du grade de général de division le 24 avril 1794.
Le 13 mai 1794,
après la destitution de Turreau, il est nommé par le Comité de Salut Public
Commandant de la 3e division de l'Armée de l'Ouest avec son quartier général à
Doué-la-Fontaine.
Sa carrière en Vendée s’achève à la fin de l’année 1795. Mais il refuse un
poste à son grade dans l’armée de Sambre-et-Meuse le 14 octobre 1796, préférant
ne pas s’éloigner de sa région. Du reste, il est élu maire de Doué de 1804 à
1815. Il meurt à Montbrillais (86) le 31 août 1828.
Jean-Baptiste Kléber, né le 9 mars 1753 à Strasbourg,
assassiné le 14 juin 1800.
Général de brigade, il
est envoyé en Vendée à la tête de la provisoire armée de Mayence pour y écraser
le soulèvement. Battu à la Bataille de Tiffauges, Il remporte la victoire à la
Bataille de Montaigu, à la Bataille de Cholet, à la Bataille du Mans et
finalement à la Bataille de Savenay3 (décembre 1793). Il clôt ainsi la
« grande guerre » vendéenne.
Joseph Fayau des Brétinières, né
le 25 mars 1766 à Rocheservière (Bas-Poitou) et
décédé au même lieu le 8 germinal an VII (28 mars 1799)1, fils de Jean-Baptiste Fayau, sieur de
Pampinière, chirurgien assassiné en l'an II par les
insurgés vendéens, il devient avocat et se fait appeler « M. des
Brétinières » avant la Révolution6.
Partisan des idées révolutionnaires,
il devient colonel de la garde nationale de Rocheservière
En novembre 1793, Fayau propose à la
Convention une solution radicale au problème royaliste: incendier la Vendée
afin de la rendre inhabitable pendant un an. Il propose aussi que tous les
biens des aristocrates soient redistribués aux sans-culottes.
Louis Grignon, né le 16 août
1748 à Louerre
et décédé le 25 décembre 1825
est un général de la
Révolution française.
En 1792,
il est adjudant-général dans la garde nationale de Saumur et en tant
que tel participe aux combats contre les Vendéens.
Le 28 novembre
1793, il est nommé général
de brigade. Il participe aux colonnes infernales et commande la deuxième
colonne. La colonne de Grignon fut l'une des plus meurtrière, tuant et
massacrant tout sur son passage.
Joseph Crouzat né le 25 février 1735 à Sérignan, mort le 25 avril 1825 à Metz , jusqu'au mois de
janvier 1794, aura une conduite exemplaire.
Soldat, sous-officier puis officier il gravit un à un les différents grades
puis sera nommé général le 22 septembre 1793 dans l'Armée du Nord. Après cette
nomination, il est envoyé en Vendée ou il prendra le commandement d'une colonne
infernale sous les ordres du Général en Chef Turreau. Obéissant avec une
méticulosité extrême aux ordres, il participe aux nombreuses tueries qui vont
ensanglanter la Vendée. Il devient alors l'un des chefs républicains les plus
détestés des populations vendéennes.
Étienne Jean-François Cordellier-Delanoüe, né le 29 avril 1767 à Faremoutiers, mort le 10 juillet 1845 à Paris,
Arrivé à Saumur le 29 novembre puis à Angers le 1er janvier 1794, il est placé
à la tête de la 5e division, qui forme la neuvième colonne incendiaire, sous le
commandement de Turreau, en janvier-mars 1794. Ce dernier lui remet ses instructions
le 17 janvier, et il prend le commandement de ses troupes, stationnées à
Brissac, deux jours plus tard ; il ne dispose alors que de 1 870 hommes sous
les armes. Sa colonne perpétra de nombreux massacres dans le bocage vendéen. Le
13 mai de la même année, il est suspendu, poursuivi et emprisonné.
Amnistié avec plusieurs de ses collègues, il est relevé de sa suspension le 19
juillet 1795, mais sans réintégration.
Marie Joseph Lequinio, né le 15 mars 1755 à Sarzeau où il est mort le 19 novembre 1814, est un bourgeois révolutionnaire français, député à la Convention
et représentant en mission auprès de l'Armée de l'Ouest.
Il a été le seul à oser venir dénoncer le 1er avril 1794 devant le Comité de salut public les atrocités qui se
perpétraient en Vendée. Son rapport a été publié pour la première fois en 2012.
(voir ci-dessous Guerre
de la Vendée et des Chouans de Lequinio)
Jean-Julien-Marie Savary, est considéré comme un
Choletais d'adoption puisqu'il se trouvait à Cholet, en 1790. Avocat en 1780,
il adopte les principes de la Révolution prenant une part très active aux
guerres de Vendée. Il est président du tribunal de Cholet de 1790 à 1793.
Lorsque la guerre de Vendée éclate, Savary est capturé par les insurgés mais
parvient à s'évader. Il devient ensuite commissaire civil auprès de
l'état-major des généraux Canclaux et Kléber, puis adjudant-général dans
l'armée de l'Ouest et participe à la bataille de Savenay. Il se montre hostile
aux représailles et au plan des colonnes infernales de Turreau et à Nantes. Il
tente, auprès de Carrier, de sauver les enfants vendéens faits prisonniers
Il a écrit entre autres : “Guerres_des_Vendéens_et_des_Chouans_contre_la_République_française”
d’où sont extraits les rapports envoyés à Turreau pâr chaque général de
colonne.
L'armée de Mayence de 1793
est formée de la garnison de Mayence qui fait partie de l'Armée du Rhin, faite prisonnière à la fin
du siège de la ville.
Libérée par l'ennemi sous le serment de ne plus le combattre contre lui, elle
est donc envoyée sur le théâtre d'opérations intérieur de la guerre de Vendée, précisément dans le
département de la Loire-Inférieure en soutien de l'armée des Côtes de Brest d’août à octobre 1793, puis elle est fondue dans l’armée de l’Ouest ;
Lire aussi :
Les
colonnes infernales de Daniel Guillon
Les
ordes de Turreau de Jean-Pierre Rambaud
Guerre
des Vendéens et des Chouans contre la République...
Les
Mémoires de Pierre Devaud (1765-1826)
Guerre
de la Vendée et des Chouans de Lequinio (original)
Guerre
de la Vendée et des Chouans de Lequinio (texte brut)
Récit
d’Elie Eyquard , sergent bleu
Récit
du brigadier Graviche
Aspects de la Chouannerie dans la Manche