Pays rédimés des gabelles
Avant la Révolution de 1789, les "pays rédimés des
gabelles" (ou plus simplement "rédimés", du latin redimere,
racheter) sont des provinces de l'Ouest et du Sud-Ouest de la France qui ne
paient plus l'impôt sur le sel depuis le milieu du XVIe siècle en échange du
versement d'une importante somme globale versée au roi.
Historique
L'établissement
des pays rédimés est une conséquence lointaine du rattachement définitif du
duché d'Aquitaine à la France au début du XIIIe siècle. Sous la domination
anglaise cette région est soumise, comme la France capétienne, à un impôt sur
le sel, mais plus léger que la gabelle, et qui fut maintenu jusqu'au début du
XVIe siècle. Cette disparité dans le poids de l'impôt et donc dans le prix du
sel provoquait une importante contrebande. Pour y mettre fin, le pouvoir royal
tenta d'uniformiser la gabelle par diverses mesures fiscales prises de 1537 à
1544.
Cette augmentation
de la fiscalité provoque en 1548 une insurrection dans les provinces littorales
concernées: la Révolte des Pitauds. Après une sévère répression, un compromis
est accepté par le roi Henri II. Les représentants du clergé, de la noblesse et
du tiers état des "pays" de Poitou, Châtellerault, Saintonge,
"ville et gouvernement de la Rochelle", Angoumois, Haut et Bas
Limousin, Haute et Basse Marche, Périgord et "enclaves et anciens ressorts
d'iceux" obtiennent en 1549 la suppression de la gabelle et des greniers à
sel. En échange, ils s'engagent à payer en une seule fois la somme de 450 000
livres. Les provinces concernées doivent cependant continuer à payer une taxe
annuelle, qui est rachetée à son tour en 1553. Dès lors le Poitou, le Limousin
et la Marche sont exonérés de tout impôt sur le sel.
Les dépôts de sel
L'existence des pays rédimés, où le sel n'était soumis à aucune taxe, donnait lieu à une contrebande intense (le "faux saunage"). Pour la combattre, le règlement général de juin 1660 établit des "dépôts de sel" à proximité immédiate des pays de grande gabelle, concernant les paroisses situées dans une zone de 5 lieues de largeur (20 kilomètres environ) bordant ces pays. Comme les greniers à sel, les dépôts ont chacun une circonscription bien délimitée. Les habitants concernés doivent obligatoirement y acheter leur sel, afin d'empêcher la constitution de surplus négociables frauduleusement. La consommation annuelle est règlementairement limitée à un minot (72 litres, réputés peser 48,90 kilogrammes) pour sept personnes âgées d'au moins huit ans, salaisons comprises. Dans les régions pourvues de dépôts de sel, on se plaint donc d'une pénurie organisée, quand la surconsommation de ce produit est dénoncée de l'autre côté de la "frontière".