Jean Geindreau assassiné par Joseph Gourdon,
 le 23 novembre 1855, à Mazières


Le journal des débats politiques et littéraires du 3 décembre 1855 publie cet article :

 

 — « On nous rapporte; dit le Phare de la Loire, qu'un crime a été commis le 25 novembre (1855) au pont de la Liaudiere,
vis-à-vis du bourg de Mazières, à quatre ou cinq kilomètres de Cholet.

Le
nommé Gindron, (en fait Geindreau) fermier à la Tortière,commune de la Tessoualle, revenant, entre onze heures et minuit,
du marché de Cholet, y a été frappé de quatorze coups de couteau.

L'assassin serait un individu qui aurait abordé Gindron en chemin, et dont celui ci aurait fait  imprudemment son compagnon de route…

Il y avait cinq ramasseurs de choux dans le champ voisin du lieu où le crime a été consommé.
Ils sont accourus aux cris de la victime, et l’assassin, n’ayant pas eu le temps fouiller les poches du malheureux Gindron, s’est enfui
a
vee l'agilité que donne l’épouvante, pour se réfugier dans un champ de choux où il a pu se blottir et échapper aux regards de ceux
qui cherchaient à l’atteindre.

Les médecins appelés à procéder à l’examen du corps de Gindron, ont remarqué que les coups paraissent avoir été portés par une main
habile vers la
gorge, où ils tendent tous sans exception.
On suppose cependant que la victime s'était défendue de son mieux, le quatorzième coup seul a dû couper la jugulaire opiniâtrement ajustée.
On est à la recherche du coupable… »


Il s’agit là du meurtre de
Jean Geindreau, né le 13 Vendémiaire an X, (5 octobre 1801) à la Tortière de la Tessoualle, de Louis et Marie Brosseau
voir ici son  ascendance

L’assassin, Joseph Gourdon fût arrêté dès le lendemain et inculpé rapidement d’homicide volontaire et de vol domestique.
Ce Joseph Gourdon est né le 16 mars 1828 à St Aubin de Baubigné, de Jacques Gourdon et Renée Naud, (famille respectable au dire des témoins) ; une décision du Tribunal de Bressuire du 15 octobre 1859 indique qu’il ne figurait pas sur les registres. (voir insère ci-dessous dans le registre à la date dite)
 

Vous pouvez lire ici les premières années de Joseph Gourdon, tueur de cochons, de son métier.
et ici son ascendance
Traduit en Justice, Joseph Gourdon fut condamné le 14 Mai 1856, par la Cour d’Assises du Maine et Loire, aux travaux forcés à perpétuité, pour « homicide volontaire et vol ».
Le tribunal le décrit comme étant illettré, mesurant 1,68m et fortement charpenté.
C’est ce jour-là qu’il déclara être né aux Cerqueux en 1828 ou 1829.

Vous pouvez lire ici le registre d’écrou


La peine ne supportant pas de pourvoi, il arrive au bagne de Brest le 2 Juin  et est embarqué sur la frégate l’Africaine, le 24 Octobre 1856 à destination de Cayenne en Guyane.
Après 6 semaines de traversée, dans une cage comme celle-ci,  il arrive en Guyane le
3 Décembre 1856, sous le matricule 5474.
Il ne sera transféré à
St Laurent du Maroni qu’après 1858, date de création de ce nouveau centre. Bizarrement aucun déplacement n’est signalé dans son dossier, mais lors de son mariage en 1860, il est déjà résident à St Laurent du Maroni. 
Il arrive au bagne à une époque où marier les détenus entre eux était une des préoccupations de l’administration pénitentiaire, afin de peupler la colonie.
Après les accords nécessaires pour ce faire, le 1er aout 1860, Joseph Gourdon épouse Flavie Monnier, originaire de l’Oise, et détenue comme lui,
- Consentement de sa mère,
Renée Naud, devenue veuve le 25 janvier 1859.
- Autorisation du Gouverneur de la Guyane (ci-dessous)

De cette union naîtront 3 enfants :
- Joséphine, née en 1862, mariée avec François Louchard, bagnard parisien, est décédée à St Laurent du Maroni le
1er juin 1883 à l'âge de 21 ans, sans enfants, semble-t-il..
- Aimé, né en 1864  décédé à Saint Laurent du Maroni le 30 septembre 1874 à l'âge de 10 ans.
- Louis, né en 1867, décédé à Saint Laurent du Maroni le 15 août 1874 à l'âge de 7 ans.

 
 
Joseph Gourdon s’est sans doute bien comporté « sans punition »  car sa peine de perpétuité fut commuée en 20 ans de travaux forcés en 1866 et il bénéficia d’une remise de  peine de 3 ans en 1874.
Il semble toutefois qu’il ait complètement oublié l’Anjou et sa famille durant ces années de bagne puisqu’en 1869 sa mère se crût obligée de faire une requête auprès du ministère des Colonies afin de savoir si son fils était toujours vivant.
Flavie Monnier, l’épouse de Joseph Gourdon, décéda le 30 Décembre 1878 à l’age de 42 ans.
Joseph Gourdon, lui, s’éteindra le 25 Août 1882, âgé de 54 ans,
tous les deux à
St Laurent du Maroni

Annexes :

BULLETIN OFFICIEL DE LA GUYANE FRANÇAISE. ANNÉE 1860. 
CAYENNE, 

Décision n° 334.

— DÉCISION qui autorise le transporté GOURDON (Joseph) et la femme MONIER (Flavie-Félicité-Henriette), tous deux internés au Maroni et appartenant à la lre catégorie, à contracter mariage.

Cayenne, le 30 mai 1860.

LE GOUVERNEUR de la Guyane française,

Vu les dépêches ministérielles des 27 avril n° 312 et 26 juillet 1858 n° 32, attribuant au gouvernement local, en vertu de l'article 12 de la loi du 30 mai 1854, la faculté d'accorder aux transportés l'exercice, dans la colonie, de tout ou partie des droits civils ;

Vu la demande présentée par le nommé GOURDON (Joseph), n° 5474, concessionnaire de la seconde série, à l'effet de se marier avec la femme MONIER (Flavie-Félicité-Henriette), n° 31, également transportée-,

Vu le consentement donné par cette femme à ladite union ;

Sur la proposition du directeur des établissements pénitentiaires par intérim,

DÉCIDE :

Article 1er. Le transporté GOURDON (Joseph), n° 5474, et la femme MONIER (Flavie-Félicité-Henriette), n° 31, tous deux de la 1re catégorie des condamnés, et internés au Maroni, sont autorisés a contracter mariage : ils pourront, par suite, exercer les droits civils qui dérivent légalement dudit acte.

Art. 2. Le chef du service judiciaire et le directeur des établissements pénitentiaires sont chargés, chacun en ce qui le concerne, d'assurer l'exécution de la présente décision, qui sera enregistrée partout où besoin sera , et insérée sommairement au Bulletin officiel de la colonie.

Cayenne, le 30 mai 1860.

L. TARDY DE MONTRAVEL.

Par le Gouverneur :

Le Directeur des établissements pénitentiaires par intérim, CHAUDIERE.

Enregistré au contrôle, registre n° 33 des ordres et décisions, f° 181.

ORDRES, NOMINATIONS, ETC.

http://www.manioc.org/gsdl/collect/patrimon/tmp/FRA11254.html

 

L’Africaine est une frégate de 46 canons de type Heliopolis, construite en 1839.

Caractéristiques
dimensions 1 700 t déplacement 48.80 x 12.40 x 5.65 m effectif 327/391  (150/170 en transport) propulsion  voilure : 1 846 m²

Construite à St Servan

Armée en 1840 : bat : 24x18 + 4x16cm - gaill : 16x30 car + 2x18
sur cale le
1-2-1835 - lancement le 9-8-1839 - en service 26-11-1840 – rayé des listes le  7-3-1867

 

Histoire

• 30-5-1842 : à Cadix (CV Julien Brindejonc-Treglodé).
• 18-9-1847 : désarmée.
• 6-1849 : à Fort de France - station des Antilles.
• 5-2-1850 : à Fort de France.
• 17-2-1856 : arrivée à Toulon venant de Constantinople.
• 16-12-1856 : à Fort de France.
• 1852 : en cale pour refonte à Brest. 
• 22-1-1853 : appareillage de Brest pour Fort de France. 
• 13-2-1853 : arrivée à Fort de France. 
• 1854-55 : en Mer Noire.
• 14-9-1854 : à Varna. 
• 1855 : armée en transport.
• 23-11-1855 : passe devant l'île de Ténédos en route vers Constantinople. 
• 7-1863 : appareillage de Brest pour la Martinique. 
• 27-12-1863 : sur rade Fort de France, venant de Cayenne.
• 7-3-1867 : condamné, ponton-magasin à la Martinique.
• 1872 : démoli.

 

A partir de 1855, elle a été affectée à Brest pour le transport de condamnées vers la Guyane. Elle est désarmée en 1872 à la Martinique.

 

Cayenne - St Laurent du Maroni
Fondé en 1852 sous Louis-Napoléon Bonaparte, le bagne de Cayenne était situé sur l'Anse du Chaton, non loin de la Pointe de Buzaré, à Cayenne en Guyane française.
Le 22 novembre 1850, Louis Napoléon proclamait :
« 6 000 condamnés dans nos bagnes grèvent les budgets d'une charge énorme, se dépravant de plus en plus, et menaçant incessamment la société.
Il me semble possible de rendre la peine des travaux forcés plus efficace, plus moralisatrice, moins dispendieuse, et plus humaine en l'utilisant au progrès de la colonisation française ».


Prétextant la ruine de la Guyane, le gouvernement français prend la décision, en 1851, de transformer cette possession en un vaste pénitencier.
Dans un rapport du 20 février 1852, Ducos, ministre de la Marine et des Colonies, indique les motifs qui incitent le gouvernement à tenter une autre colonisation fondée sur le bagne, qui débarrasserait la France d'une "vraie lèpre sociale qui entretenait les traditions de l'école du crime dans les bas-fonds de la population".

Le 31 mars 1852, la frégate l'Allier, quitte Brest. A son bord, 288 condamnés qui proviennent des bagnes de Brest et Rochefort, et 3 déportés politiques.
le premier convoi de condamnés partait de Brest à destination des îles du Salut.
Les installations du pénitencier étaient constituées de trois baraquements désignés sous le nom de « Europe », « Afrique » et « Asie ».
Il comprenait 4 dortoirs, 19 prisons et 77 cellules, ainsi qu'une infirmerie, des cuisines et des logements pour le personnel pénitentiaire.

Les bagnards sont employés soit dans les travaux publics (assainissement des marais ou entretien des installations portuaires, construction de routes) soit au service des particuliers.

La loi du 30 mai 1854 qui institua les bagnes coloniaux décidé l’envoi à Cayenne de tout condamné aux travaux forcés, ainsi que celui des femmes, pour y être mariées aux bagnards et participer ainsi au peuplement de la colonie.
La loi, toujours dans le même souci de colonisation, inaugurait le système du “doublage”, c’est-à-dire l’obligation de résidence à la fin de la condamnation, pour un temps égal à celui des travaux forcés, ou à perpétuité, pour une peine de plus de huit ans. Ce “doublage” s’accompagnait de l’attribution de lopins de terre, de concessions.

 

Le cinquième gouverneur de la Guyane en cinq ans, l'Amiral Baudin préconise la création du pénitencier à St Laurent du Maroni, et le 21 février 1858 est inauguré ce nouvel établissement

Le bagne de St-Laurent-sur-Maroni n'était qu'un dépôt temporaire. Dans ce camp, tous les condamnés débarquaient pour être ensuite envoyés dans les autres camps et pénitenciers.

Seulement un petit nombre de bagnards restait à St-Laurent. Ceux-ci étaient presque tous employés dans l'administration (par exemple jardiniers) et étaient des hommes considérés peu dangereux.
Ceux qui avaient la chance de rester à St-Laurent étaient généralement beaucoup mieux traités que les condamnés des autres camps. Leur travail était simple, ils pouvaient aller et venir presque librement dans l'enceinte du bagne (leurs cellules de 2 m de longueur sur 1,80 m de largeur servaient uniquement pour dormir) et ils avaient droit à une meilleure nourriture, excepté les bagnards punis. Ceux-ci étaient alors enfermés au quartier disciplinaire constitué de quatre cases collectives dans lesquelles ils étaient allongés sur des bat-flancs en ciment munis de « barre de justice » enchaînant les chevilles avec une manille.


Si le bagne fut officiellement supprimé en 1938, ce n'est qu'en 1953 que les derniers forçats rentrèrent en métropole.




Voir le site :

http://lescerqueux.com/en-vrac/personnages-marquants/joseph-gourdon-bagnard/#_ftn1